Samedi 15 mars à l’Église Saint-Donat de Montréal, les Productions ACDiaz présentaient Piano intime, un concert de près de 90 minutes mettant en vedette Alejandra Cifuentes Diaz, pianiste virtuose, professeure de piano, accompagnatrice d'instrumentistes et de chanteurs.

Le concert était au bénéfice de La Maison Bleue dont la mission est de « réduire les inégalités sociales en intervenant auprès des femmes enceintes en situation de vulnérabilité et leur famille », favorisant ainsi « le développement optimal des enfants, du ventre de leur mère jusqu’à l’âge de 5 ans. » Durant la saison 2024-25, pour chaque billet vendu 1$ est remis à cet organisme. La saison dernière c’était la Fondation droit au talent qui en bénéficiait.

La charmante Alejandra – de formation classique à Vincent-d'Indy, à l’Université de Montréal et au Conservatoire de Moscou – dirige Les Productions ACDiaz qui présentent des concerts, sous lumière tamisée, rehaussés d’anecdotes sur les compositeurs et bonifiés par la présence d’un grand écran où tous les spectateurs peuvent suivre les jeux de mains de la pianiste sur le clavier. Pour l’occasion, deux douzaines de petits et grands lampions ajoutaient à l’atmosphère méditative du lieu.

Autres particularités de ces concerts : pour la durée d’une pièce, une douzaine de spectateurs sont invités à se placer autour du piano et à le toucher pour « vivre une expérience sensorielle unique. » Aussi, « à la fin de chaque concert, le public choisit la pièce de rappel en votant pour leur pièce préférée » à l’aide de leur téléphone intelligent, après avoir balayé un code QR sur le programme imprimé.

Et si vous avez malencontreusement oublié d’apporter votre coussin, pour contrecarrer l’inconfort endémique des bancs d’église, Les Productions ACDiaz offrent de vous en vendre de fort jolis et confortables directement sur place.

Le programme

Dans l’annonce de ce concert, qui était dans l’en-tête de la page Facebook d’Alejandra, il était notamment spécifié : « Musique classique et de films ». Or, de musique de films (au pluriel) il n’y a eu que la « Valse d’Amélie » du film Amélie Poulin, jouée en rappel et choisie par vote du public, qui aurait évidemment pu en décider autrement. Exception faite de la pièce d’André Gagnon, intitulée Comme au premier jour, toutes les pièces relevaient du répertoire classique. 

Au programme de la soirée on retrouvait des œuvres de Claude Debussy, Franz Liszt, Robert Schumann, Clara Wieck (épouse de Robert Schumann), Johannes Brahms (fidèle ami des Schumann), Frédéric Chopin, Ludovico Einaudi, Jean-Sébastien Bach, Valérie Carreau (pianiste, compositrice et professeure de piano montréalaise) et André Gagnon.

Appréciation

Malgré l’absence au programme de notoires compositeurs de musique de films, tels les Ennio Morricone, John Williams, Nino Rota, Henry Mancini, etc., la soirée a néanmoins été des plus berçantes et mémorables grâce à un judicieux choix de grands classiques expertement interprétés par une virtuose émérite, qui soigne son jeu, l’ambiance du lieu et ses instructives présentations des différentes pièces. 

Toutes les œuvres au programme - telles le Clair de Lune de Debussy ou Le passé défile de Valérie carreau - n’étaient certes pas dénuées d’intérêt, bien au contraire. Ce concert dans son ensemble a été un véritable coup de cœur pour moi.

J’ai tout particulièrement apprécié la virtuose Rhapsodie hongroise n^o 2 de Liszt, le Scherzo n^o 2 de Clara Wieck Schumann, Comme au premier jour d’André Gagnon, la planante Fantaisie-Impromptu op. 66 de Chopin et les deux ensorcelants rappels, soit le fameux Canon de Johann Pachelbel et la jouissive « Valse d’Amélie » du film Amélie Poulin, d'incontournables prétendants au statut de vers d’oreille.

Mes très légers bémols : Experience d’Einaudi, une série de variations sur un même thème, une pièce un peu trop répétitive à mon goût. Il en va de même pour la Chaconne de Bach-Brahms jouée uniquement de la main gauche et que Brahms a composée pour accommoder son amie Clara Schumann alors blessée à la main droite.

J’ai déjà eu le grand plaisir d’assister à un concert d’Alejandra et d’en faire la louange dans ma critique. Une 1^re fois, en cette même Église Saint-Donat, le 19 avril 2024, pour ce même concert, intitulé Piano intime, qui proposait alors un programme comportant, entre autres, cinq pièces qui ont été reprises cette année; et une 2^e fois, le 1^er juin 2024, pour Danses à 4 mains, alors qu’elle se produisait en duo, au Studio Dissonances, avec sa collègue et pianiste Tatiana Dvorianskaya dans un répertoire fort différent cette fois-là.

Cette année, malgré les cinq reprises, je m’y rendais surtout pour les ajouts et différences. Mais se lasse-t-on jamais de réentendre de si mémorables chefs-d’œuvre, même si on les a déjà entendus... l’année précédente ? Ô que non ! Au final, j’ai été comblé de les retrouver et de m’en laisser bercer à nouveau.

Nous, spectateurs attentifs et passionnés de musique classique, ne formions qu’une foule réduite dans cette vaste enceinte qui aurait dû être pleine à craquer compte tenu du caractère éminemment relevé des prestations offertes par une virtuose au sommet de son art et à qui nous avons servi une ovation debout et de chaleureux applaudissements légitimement mérités. J'ai déjà hâte à ma prochaine immersion dans l'univers musical enchanteur d'Alejandra.

Piano intime sera repris à Trois-Rivières le 26 avril et à Sherbrooke le 17 mai. Quant à Danse à 4 mains (du piano à 4 mains sur 1 seul instrument), il se donnera à St-Bruno le 29 mars, à St-Lambert le 12 avril et à Ste-Thérèse le 10 mai. Accédez au site internet Les Productions ACDiaz pour en apprendre davantage sur Alejandra Cifuentes Diaz, et sa consœur Tatiana Dvorianskaya, et vous procurer des billets pour un prochain concert en solo ou en duo.