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Cette part d’obscurité de l’auteur Michel Dufour paru aux Éditions Sémaphore révèle 12 nouvelles dont chacune sonde l’obscurité profonde de ses personnages. La grande noirceur ici frappe surtout l’enfance et la vieillesse, phases de la vie d’où on ne soupçonne pas toutes les ténèbres quotidiennes. L’auteur est courageux et brandit la plume sur ces personnes qu’on ne voit pas ou qu’on ne veut pas voir.
Dans Cette part d'obscurité, l’équilibre est précaire entre le réalisme et le fantastique. L'auteur Michel Dufour décrit des scènes troublantes et si près de nous que notre regard sur les autres en est transformé. Comment voir à travers le voile qui nous obstrue la vue là où nous ne voulons pas, justement, voir la vérité? Les tabous sont multiples. L'auteur Michel Dufour nous propose des personnages qui n'auraient, sans sa plume, aucune visibilité ni aucune attention de notre part. Lire Cette part d'obscurité nous rend vulnérables.
La première nouvelle du recueil entrecroise enfance et vieillesse. La maladie de Paco, l’enfant vieux, attire les railleries, le dégoût, son apparence est celle d’un vieillard, mais son coeur est jeune. Sa maturité et la poésie qui l’habitent nous désarçonnent. Il espère un regard similaire au sien, une complice dans la maladie, recueillir un dernier souffle dans sa vie juvénile, mais pleine de tristesse. Retiré de l’école, Paco devient sujet de manchette et de curiosité morbide. Paco reçoit plusieurs lettres suite à ses apparitions médiatisées, dont celle d’une dame de 80 ans; sa petite-fille est, elle aussi, atteinte de cette maladie qui le ronge. Une rencontre fut organisée entre les deux enfants.
"Paco, sous le regard ému de ses parents, s'étend à côté d'Annabella. Leurs deux corps, pareils à des épaves rejetées par la mer, ne font qu'un dans le petit lit. Avec le peu de forces qu'il lui reste, il se met à lui parler des papillons qui sommeillent au coin de ses yeux. Au crépuscule, l'un des papillons dit à l'autre qu'après toutes ces années à vivre côte à côte sans vraiment se connaître, ils devaient se séparer."
La maladie et la mort d’un enfant sont des sujets plus que délicat que l'auteur aborde avec amour et empathie, tout comme pour les autres personnages qui suivent. Il y a l’enfant né garçon qui se sait fille et qui, un jour, décide de sortir de sa coquille. "Était-il une fille? Cette question, il se l’était posée maintes fois (...)" La petite fille qui n’a jamais connu son père et qui aurait aimé en avoir un comme celui de son amie-voisine. L’herbe était-elle si verte pour cette famille dont le père sera un jour arrêté pour on ne sait quelle raison. "Adieu, chère amie.. Ton père a-t-il été reconnu coupable de quelque chose?"
L’enfance n’est pas toujours rose et les peurs et les peines sont nombreuses dans le coeur d’un enfant. Tant de silence retenu et de larmes refoulées ne peuvent qu’aboutir, parfois, à des drames.
"L’école le fait chier. Voilà la brillante réflexion qu’invariablement il se répète quand il pense à sa motivation scolaire. Ses parents pourraient lui inspirer le même dégoût que l’école. Mais Thomas refoule cette triste vérité que, de toute manière, ils n'apprécieraient guère (...) Les premiers de classe? S’il le pouvait, il les alignerait devant le tableau et les fusillerait un à un sous le regard complaisant des autres rejets comme lui."
Il est parfois difficile de s’arrêter au drame humain dans son état le plus malsain. Qui sait où les injures des camarades, des professeurs et autres adultes qui entourent l'enfant aboutisseront si ce n'est que contre eux ou contre lui. La vulnérabilité de l’enfant ramène à la plus grande sensibilité de l’être.
Parler des personnes âgées sans filtre sociétal
L’auteur décrit l’enfance et la vieillesse avec réalisme, mais aussi avec délire. Quelques nouvelles sont saupoudrées de magie et d'illusion, la psychose est fatale, l'humain est fragile dans son déséquilibre. Certains personnages de Michel Dufour manipulent la réalité sans scrupule dont belle-fille qui invente des délires chez sa belle-mère âgée pour la faire placer, poussant la dame à quitter les lieux non sans plier l’échine. "Quand je lui rendis visite au foyer où elle s’était finalement résignée à vivre pour échapper à l’emprise d’Olivette, ma grand-mère, intarissable malgré ses quatre-vingt-onze ans, me raconta cette histoire avec franchise et lucidité, me fit promettre de l’écrire et de la lire devant tout le monde à ses funérailles." Comment peut-on abuser de ces personnes qui ont toute leur tête et qui ont toute leur vie pris soin des autres? Ces êtres existent pourtant bel et bien.
Une fois placés, les aînés sont souvent laissés à eux-mêmes.
"Invariablement, à longueur de journée, tel un automate éreinté, claudiquant, ronchonnant, il arpente le même corridor avec sa marchette, entre dans des chambres semblables à la sienne, effraie les autres patients."
La démence est un sujet peu exploité dans le monde littéraire, mais est pourtant bien présente chez nos aînés. Le quotidien est lourd pour ceux qui n’ont plus de famille ou qui n’ont personne sur qui compter. Il n’y a que les souvenirs qui peuplent les jours qui se suivent et se ressemblent. La solitude massacre les derniers mois des personnes qui ont jadis eu une vie remplie.
"Aux premières lueurs de l’aube, assise dans un fauteuil roulant près de la fenêtre, Émilienne attend de vivre. Elle dit qu’elle est morte. Elle ne comprend pas pourquoi elle se trouve à l'hôpital plutôt qu’au cimetière (...)"
A-t-on les ressources nécessaires pour accompagner ces personnes laissées à elles-mêmes? Ne suffit-il que d’une rencontre avec une travailleuse sociale pour déterminer les besoins d’un être qui souffre, mais qui désire l’autonomie, la dignité, le respect? Comment les familles et les services sociaux peuvent-ils abandonner les personnes âgées? Il existe des drames atroces qu’on tait parce qu’on ne peut concevoir que ces personnes mûres puissent être si en détresse: le suicide chez la personne âgée qui se laisse mourir dans sa maison, le couple dont un des deux souffre d’une maladie mentale, l’isolement, l’abus, tous ces deuils à vivre en fin de vie...
Il y a dans Cette part d’obscurité plein de tabous difficiles à tolérer. Le malaise ressenti lors de la lecture révèle bien les limites psychiques, émotives et sociales qui sont ancrées en nous, par notre éducation, par nos peurs, par censure. Il faut apprivoiser ces vertiges passagers qu'imposent les sujets délicats si on veut les transcender. La plume de Michel Dufour est admirable et puissante. Quelle belle lecture!
Vous pouvez vous procurer Cette part d’obscurité aux Éditions Sémaphore, en plus d’y découvrir tous les ouvrages de cette merveilleuse maison d’édition. Voyez d’autres publications de Michel Dufour.
Merci aux Éditions Sémaphore pour leur collaboration!
Cette part d'obscurité
Michel Dufour
Les Éditions Sémaphore