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La délicieuse pièce, "Le miel est plus doux que le sang" de Simone Chartrand et Philippe Soldevila est présentée au Théâtre Denise Pelletier jusqu'au 27 février 2016 avec quatre excellents comédiens: Isabelle Blais, François Bernier, Renaud Lacelle-Bourdon et Simon Lacroix, dans une mise en scène de Catherine Vidal.
Avec un tel titre de pièce, qui est le rappel d’une des premières peintures de Dali inspirée de sa relation avec Federico Garcia Lorca, on pourrait s’attendre à un drame romantique sur fond de crime. Au contraire, on découvre un texte poétique, tout en nuances, rythmé et raffiné.
L’histoire évoque une rencontre entre Federico Garcia Lorca (Renaud Lacelle-Bourdon), Luis Buñuel (François Bernier) et Salvador Dali (Simon Lacroix) à la genèse de leur carrière. L'Espagne des années folles, synonyme de plaisirs, nous révèle des êtres à la fois inspirés et vulnérables, emplis de doutes autant que d’espoirs. En deux mots, nous sommes au balbutiement de l’éclosion du talent de ses monstres artistiques qui luttent pour se définir, se libérer de la médiocrité bourgeoise et révéler leur légende personnelle.
Au départ, le rythme et le style qui effleure la Commedia Dell'arte sont charmants. Ensuite, la mise en scène très efficace est si bien ficelée et offre tant de liberté de jeu permettant aux comédiens de s'éclater qu’ils n'ont qu'à s'y abandonner. Le travail de Catherine Vidal supporte le jeu des comédiens avec perfection. Leur enthousiasme devient alors contagieux.
Le personnage de Lolita incarné par Isabelle Blais, une talentueuse chanteuse de cabaret, dit qu'elle vit dans un monde d'hommes. Au lieu de se plier à la vision de l'époque, elle choisit de se battre et d'influencer les hommes qu’elle rencontre dans cette résidence étudiante de Madrid, en utilisant absolument tous ses outils. Elle est forte, c'est une battante, tout pour inspirer de jeunes hommes en découverte de leur talent. Elle les incite à briser leur barrière personnelle, à se battre contre la médiocrité et la banalité, puis à déployer la beauté de leur essence sans cliché. Devenue leur muse, elle les pousse à se révolter, à voir au-delà de ce que la société leur présente.
À l’orée de la révolution espagnole, on sent l’effervescence de la jeunesse qui veut prendre sa place. Une pièce qui nous inspire à approfondir notre connaissance de ces êtres plus grands que nature qui ont révolutionné leur époque avec leur art et dont on se félicitera toujours de connaître.
La pièce a été présentée il y a une vingtaine d’années dans un style très différent. C’est volontairement que Catherine Vidal a voulu la revoir avec beaucoup d’innovation. Sa mise en scène transforme le régisseur général en chef d'orchestre, à qui on aurait confié mille et un musiciens hétéroclites qui jouent leur partition sans fausses notes. La scénographie nous réserve aussi quelques surprises…
Dali, un personnage si bien découpé, voir typé, qui nous fait craquer à chaque réplique provoquant de nombreux éclats de rire. Original, coquin et drôle, Simon Lacroix réussit haut la main à nous charmer.
Isabelle avec son élégance du geste, nous envoûte de ses désirs et de sa jeune folie. Toutes ses chansons sont interprétées en direct. Elle marque le rythme de ses mains et de ses pieds avec quelques pas de danses espagnoles, sans manquer une seule note ou un temps. Elle possède la scène dès qu'elle y entre et ensorcelle ses compagnons sous son charme.
Luis Buñuel (François Bernier) et Federico Garcia Lorca (Renaud Lacelle-Bourdon) nous guident avec jovialité dans leur découverte de ce monde nouveau où la recherche de l’idéal prime, sans toutefois oublier de saisir toutes les occasions de s’amuser et l’inspiration du moment.
Lors d’un moment de grande intimité, Dali parle à Lorca en ces termes: "tu répands la beauté sur tout ce qui t'entoure". Inspirée par ces géants créateurs, "Le miel est plus doux que le sang" est une pièce à voir!
N’oubliez pas d’apporter votre cœur d'enfant, puis assoyez-vous confortablement et dégustez.