Le réalisateur Tristan Séguéla (à qui l’on doit 16 ans ou presque et Docteur?) revient avec la comédie Un homme heureux qui met en scène Fabrice Luchini et Catherine Frot. Ils se trouvent réunis à l’écran pour la première fois de leur carrière dans ce film qui aborde la transition de genre chez un couple de quinquagénaires bourgeois à la tête d’une mairie d’une petite ville française.... plutôt d’extrême droite. Inspiré d’une histoire vraie, Un homme heureux est un pari cinématographique risqué qui se défend, avec sympathie et bienveillance. 

Alors que Jean, maire très conservateur d'une petite ville du Nord, est en campagne pour sa réélection, Edith, sa femme depuis quarante ans, lui annonce une nouvelle qu’elle ne peut plus taire... Au plus profond de son être, elle est - et a toujours été - un homme. Jean pense d’abord à une plaisanterie mais réalise rapidement qu’Edith est sérieuse et déterminée à mener sa transition jusqu’au bout. Il comprend alors que son couple, mais aussi sa campagne électorale, risquent d’être sacrément chamboulés...

Depuis son premier long métrage sorti en 2013, le réalisateur Tristan Séguéla est attiré par le thème de la différence; qu’elle soit générationnelle dans Seize ans ou presque ou sociale dans Docteur?. Néanmoins, celle-ci est toujours traitée par le biais de la comédie : « C’est un grand vecteur de la comédie humaine. La différence provoque toujours des étincelles, des frottements. ». Le genre de la comédie fonctionne d’entrée de jeu avec la séquence d’ouverture qui, de manière presque vaudevillesque, nous place les deux secrets de nos personnages principaux. Un intelligent montage alterné, où les deux réalités des personnages se confrontent de séquence en séquence, offre plusieurs moments de rires, de sourires, et de sympathiques confrontations, où l’humour et l’amour priment toujours. 

Pour différentes scènes, le réalisateur s’entoure de personnes non binaires et transgenres qui donnent davantage de réalisme à la transition du personnage de Catherine Frot. Plusieurs générations offrent des dialogues complaisants autour de la transition de genre, qui est un nouveau monde pour notre personnage principal et, peut être, pour certains spectateurs. Car, il va sans dire qu’Un homme heureux s’adresse à des spectateurs qui peuvent être moins familiers avec ce sujet et les questions qui l’entourent. Notons également que les second et troisième degrés de plusieurs répliques passeront, peut-être, un peu moins bien auprès du public québécois qu’auprès du public français. 

Néanmoins, il en reste toutefois un film sympathique aux performances réussies. Catherine Frot livre une belle interprétation et Fabrice Luchini est, et restera, pour nous, toujours exceptionnel, comme à son habitude. À ces deux piliers du cinéma français s’ajoutent Philippe Katerine, Artus ou encore Grégoire Bonnet. Ils offrent ensemble une comédie qui fonctionne et qui se veut aussi pédagogique, sans pour autant faire une leçon de morale à ses spectateurs. Bien que le film passe par plusieurs clichés, il est également rempli de bienveillance et montre quels sont les écueils à traverser lorsque l’on décide d’entreprendre cette aventure à cet âge-là. 

« C’est une situation qui dépasse les clivages progressistes et réactionnaires. Au passage, les scénaristes du film sont très forts. Ils captent ce qui traverse l’époque sans position morale, avec un comique qui n’est jamais à charge, des dialogues rapides, efficaces, énergiques. Il y avait là une vraie partition. » précise Fabrice Luchini. Séguéla offre également plusieurs scènes émouvantes, comme le premier rasage, la recherche du nouveau prénom d’Edith, ou encore les premiers échanges avec leurs enfants à propos de ce sujet...

Un homme heureux est en salle depuis vendredi dernier partout à travers le Québec. Une comédie disponible dans un cinéma proche de chez vous pour un agréable moment de cinéma français. Trouver une séance.