Du 16 novembre au 4 décembre prochain est présenté Rock Bière: le documentaire sur les planches de l’Espace libre. À la fois un cabaret de Drag et une pièce documentaire explorant les difficultés liées à la pratique du Drag King, Rock Bière donne un nom et un visage à cet art pour qu’il ne soit plus jamais regardé de haut. Atuvu.ca s’est entretenu avec la conceptrice et metteuse en scène Geneviève Labelle, ainsi qu’avec l’alter-ego et créatrice de Rock Bière, Mélodie Noël Rousseau.

Entrevue avec Geneviève Labelle et Mélodie Noël Rousseau

Du Glam Rock, une moto, du cuir, du gaz, un aigle, de la boucane et beaucoup de bière. Ce sont les éléments qui font l’univers de Rock Bière et qui occupent la scène de l’Espace libre jusqu’au 4 décembre. Le théâtre s’est lui aussi donné une allure de cabaret pour l’occasion. On le sent prêt à recevoir des rockstars.

« Rock Bière, il est né de notre compagnie Pleurer Dans’ Douche, parce qu’on voulait faire une pièce documentaire », explique Mélodie pour clarifier la naissance de son personnage.« Ça fait depuis 2016 que notre compagnie existe, et c’est Geneviève qui se demandait à la base pourquoi il n’y avait pas beaucoup de femmes dans le milieu de la Drag. »

« Je fais du théâtre documentaire depuis 10 ans », explique à son tour Geneviève. « Je suis obsédée par ça. J’aime les histoires vraies crunchy. On a donc créé ce personnage-là déjà avec l’idée d’en faire une pièce documentaire. On s’est finalement fait prendre à notre jeu, parce que les deux on adoré ça faire de la drag. RV Métal [l’alter-ego de Geneviève] est né pas longtemps après. Rock Bière c’était le cliché du mononc’ québécois. Qu’est-ce qui le définit? Du rock, pis de la bière. »

Mettre la lumière sur les Kings

Si le grand public est de plus en plus familier avec les Drag Queens, comment se fait-il que la grande majorité n’a même jamais entendu le terme Drag King? La pièce interroge justement la place réservée aux femmes au sein de la communauté LGBTQ+, et pourquoi les femmes qui choisissent de représenter les clichés typiquement masculins ont trop longtemps été stigmatisées.

« On pourrait ne pas le penser à première vue, mais le patriarcat est encore très fort au sein de la communauté LGBTQ+. Les hommes blancs cis, même homosexuels, sont restés dans leur gang », indique Geneviève. « Il y a des femmes à qui ça fait beaucoup de bien d’être enfin représentées sur scène. Elles nous disent: “Hein, ça se peut de faire ça!”.C’est comme si nous les femmes, on se donnait pas le droit d’aller là dedans, parce qu’il s’agit du sexe fort », ajoute Mélodie.

On voit donc un Rock Bière à la recherche de ses amis Drag Kings, mais qui devient tranquillement de moins en moins seul. Depuis le succès de Rock Bière, qui a notamment remporté le concours DragMoi en 2018,  et de RV Métal, de plus en plus de Drag Kings sont bookées dans les soirées de Drag.

Photo: Katya Konioukhova

L’humour pour sensibiliser et donner le goût

Même s’il s’agit d’une démarche politique, Rock Bière: le documentaire demeure une vraie partie de plaisir. Ici, on rit de la masculinité toxique, on se défoule dans l’exploration de clichés, mais sans que personne ne se prenne trop au sérieux. « C’est comme jouer devant un public d’enfants. Devenir une rockstar pour vrai. Si les gens te trouvent plates, ils vont se mettre à jaser, mais s’ils aiment ça, ils vont crier et te le faire savoir », confie Geneviève.

Pour la touche documentaire, elles ont adopté un style à la Musimax, où la voix virile de François Parenteau décrit l’ascension de Rock Bière, et où on multiplie les entrevues avec les artistes du monde de la Drag. Il pose également un regard sur l’histoire des Drag Kings, qui remonte jusqu’au XIXe siècle.

Rock Bière: le documentaire offre donc une perspective rafraîchissante sur l’art de la Drag, donne envie de repousser les limites du genre, et nous permet d’en apprendre beaucoup sur une discipline encore méconnue, mais qui ne le sera pas pour longtemps. 

Des billets sont disponibles sur le site de la billetterie de l’Espace libre juste ici.