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Le 11 avril dernier, l'Escogriffe accueillait dans un judicieux programme triple les Montréalais Mickey Dagger et Night Lunch ainsi que la Torontoise Nyssa.
Mardi soir, 19h34, le soleil se couche sans trop se faire remarquer sur une journée de grisaille. Une longue fin de semaine complète d’un temps presque trop réjouissant (comme cet employé du Starbucks un peu zélé à 7h qui te salue en criant et te demande ton nom avant que tu aies bu ta première gorgée de café), annonçant en grande pompe à la fois l’arrivée du printemps et la résurrection du Christ, vient d’arriver à son terme. Il est temps néanmoins de s’armer d’enthousiasme en vue d’un show prévu de longue date.
21h, heure prévue de début du concert. Je passe tout droit devant l’Esco, qui de l’extérieur semble à peu près vide -une scène déserte bien visible sous l’éclairage cru, quelques coudes et quelques pintes posés sur le bar, de petites grappes de gens sur la terrasse-, me disant que j’ai dû me tromper et que la soirée a probablement lieu à la porte voisine. Je dois tout de suite rebrousser chemin et me rendre à l’évidence : le show auquel je me rends -bel et bien à l’Esco- n’est probablement pas sold out.
Considérant les circonstances post début de frénésie printanière, je comprends que certaines personnes ayant prévu de voir le spectacle ont dû être saisies d’une envie violente d’écouter la télé plutôt que de sortir un mardi soir. C’est une faute grave, mais Dieu, dans sa grande miséricorde en ce temps pascal, te pardonne, si ton choix télévisuel ne s’est pas arrêté sur Netflix ou si tu montes jusqu’au sommet des marches de l’Oratoire à genoux en portant un bonnet d’âne.
Je dois admettre que jusqu’à 20h32, ma vaillance était aussi un peu vacillante mais Dieu ouvre aussi le Royaume des Cieux aux ouvriers de la onzième heure (voir Mt 6 : 1-16). Les trois bands prévus au programme, après s’être fait un tout petit peut attendre ou peut-être après avoir attendu l’arrivée de quelques retardataires, ont aussi fini par se retrousser les manches.
Mickey Dagger
Le premier artiste à monter sur la scène, Taylor « Hoodlum » Stevenson, alias Mickey Dagger, également membre de Perestroika, a immédiatement dissipé toute frilosité dans la foule, livrant la marchandise avec une inébranlable conviction et un regard aussi convaincant qu’un poignard sur la gorge. La trentaine de minutes d’un mélange touffu d’italo et de post-punk, aux accent parfois mélodiques et dansants (irrésistible Street Survival) parfois abrasifs (reprise vigoureuse mais tout aussi racoleuse que l’originale de I want to be a cowboy de Boys don’t cry), s’est écoulée avant que j’aie eu pleinement le temps d’éprouver la satisfaction de m’être déplacée. Mon âme était sauvée.
Nyssa
Puis, changement de registre. Laissant de côté cette âpreté aux consonnances soviétiques, on s’engage dans les horizons plus hospitaliers visités par Nyssa, artiste torontoise d’origine écossaise et irlandaise. Son premier album, Girls like me, sorti en 2020 (après la sortie de quelques simples et du EP Champion of love en 2018) possède un son tout à fait singulier, entre sensibilité et fougue, influences country et new wave. On le parcourt un peu comme une longue route en train ou en voiture, au cours de laquelle le temps suspendu et les espaces grandioses traversés offrent l’occasion d’une rêverie intime sur le passé et l’avenir. On croise en chemin des réminescences du parolier de génie Lee Hazlewood, de Sinead O’Connor et de Lucinda Williams, avec sa voix rauque et chaude comme un coucher de soleil dans le désert, qui comptent parmi les influences de l’artiste. Entre fragilité enfantine et puissance, l’énergie de la chanteuse ainsi que sa voix maîtrisée et versatile évoquent aussi par moments PJ Harvey.
L’artiste, bien que le lancement de son premier LP remonte à 2020 seulement, donne l’impression sur scène d’une identité musicale murie et étoffée, ludique et éclectique sans verser dans un rapport purement ironique aux influences. Sur fond de samples électroniques où se réconcilient Neil Young et New Order, elle s’élance dans son one piece rappelant Elvis Presley en fin de carrière, dans des élans lyriques frôlant un kitsch pleinement assumé. Les paroles des chansons, dont chacune est construite comme un récit, témoignent d’un talent narratif certain, ce qui n'est pas sans contribuer à l’impression de traverser les différents tableaux d’une petite histoire. Soulignons aussi, pour terminer, la poésie simple mais sincère et émouvante de ses textes, comme celui de la chanson Misty Morning, un des moments forts du concert : "I’m too young to show you what was, and i’m too old to believe in what will be. These modern ruins, this broken heart, coult it be enough to start a family”.
Night Lunch
Le dernier groupe, Night Lunch, est monté sur scène devant une foule déjà réchauffée, qui s’était mutée à ce point de la soirée en un « wall of love » tout à fait disposé à ployer avec gratitude sous les décharges de plaisir synthétique émises à l’unisson par les compagnons de longue date Lukie Lovechild (guitare, voix), Marlee Kay (basse, voix), Wesley Dunphy (clavier) et Sailor (batterie). Cette soirée s’est donc clôturée dans l’allégresse des mélodies suaves et irrésistibles sur lesquelles on aurait voulu danser à notre bal de graduation (Your Body , reprise bichonnée d’une version lo-fi composée par Baked Goods, formation antérieure à Night Lunch) et avec quelques envolées vocales outrancières et délicieuses (on pense entre autres au tournant pop de Sean Nicholas Savage).
Le bilan : en plus de recevoir des remerciements pour avoir répondu à l'appel en ce début de semaine un peu maussade, la foule a eu droit à un concert très consistant, qui faisait l’effet d’un cadeau ou d’un privilège offert à la trentaine de gens (estimation à vue de nez) ayant bravé la torpeur d’un « lunrdi ».