Johnny Clegg a annoncé cette année qu'il tirera sa révérence... Avec grâce, il fermera donc les rideaux sur sa grandiose carrière, lors d'un voyage définitif autour du globe. Celui-ci l’amènera à Montréal le 19 octobre prochain à 20h, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Ce spectacle est dans le cadre de sa tournée mondiale The Final Journey, amorcée depuis le 1er juillet 2017. Clegg sera accompagné de ses musiciens, et de nombreux invités sont attendus, notamment la chorale Soweto Gospel Choir. À noter que son fils, Jessy Clegg, présentera son pop-rock en première partie. Le « Zoulou blanc » veut ainsi remercier ses fans, en leur offrant une dernière fois des chansons de son très large répertoire. Il s'agit, sans aucun doute, de la plus grosse production de la carrière de Clegg. Un ultime spectacle, à ne pas manquer!

La guitare: arme de résilience

En 2015, le diagnostic est tombé: Johnny Clegg souffre d'un cancer du pancréas. Toutefois, cela ne l'a pas empêché de faire une tournée nord-américaine de 9 semaines, l'année passée... Il combat ce cancer depuis deux ans, et a dû subir des traitements de chimiothérapie. Il a aussi eu l'opération de Whipple (qui consiste en l'enlèvement d'une section du pancréas et le duodénum, entre autres), ce qui a dû évidemment être un moment très difficile. Heureusement, le cancer est présentement en rémission...

À l'apogée de sa carrière, l'homme à la santé apparemment fragile est-il réellement épuisé? Entamer un périple mondial, dans cet état et en ce moment, pourrait sembler une idée mégalomaniaque, voire même irréaliste... Mais Johnny Clegg incarne un courage surhumain, propre aux survivants. Le grand musicien multidisciplinaire brave des tempêtes infernales et dangereuses, pour partager sa musique.

Debout au sommet de la montagne, vraiment, rien ne l'arrête. Voltigeant si haut au-dessus de la mêlée, traversant vents et marées autour du monde... Qu'est-ce qui lui donne des ailes, alors que la dure réalité les lui a endommagées? Est-ce qu'elles prennent forme avec le pouvoir des arts, comme un puissant matériau en fusion ? Naissent-elles à travers des notes de musique thérapeutiques, prennent-elle racine dans des mélodies guérisseuses? Se nourrissent-elles de rythmes réparateurs et de « chants-pansements »?... Incroyable phénomène.

Véritable guerrier, il porte sa guitare en guise d'arme, y extirpant les notes et les appliquant dans les vies comme des remèdes. Ses créations: des pharmacies portatives, dont les ressources semblent continuellement renouvelables. Chirurgie initialement obscure et ésotérique dans les yeux des sceptiques, sa musique est en réalité un remède ultra-puissant, qui permet la résilience physique, concrète et réelle. Un joyau enfoui en chacun de nous, en fait – une providence étrangement à portée de main.

L'ambassadeur du peuple du ciel

Vouloir combattre l'apartheid, une utopie ? Tel David contre Goliath, Johnny Clegg s'attaque à ce fameux sujet, à grands coups d'accords de guitare. Engagé dans de nombreuses causes qui lui tiennent à cœur, notamment les injustices sociales et raciales, il fait du combat envers l'apartheid la revendication centrale de ses chansons. Cet artiste a de multiples facettes: d'abord chanteur et instrumentiste (guitare et concertina – instrument similaire à l'accordéon), il est également danseur zoulou. Il excelle dans le pop-rock, et plus spécifiquement, dans le mbaqanga et l'afro-pop.

À ce sujet, il est bon de noter qu'il a commencé la guitare à quinze ans avec Mntonganazo Mzila, un musicien de rue qui lui enseigne les bases de la musique zouloue. La particularité de cette première union décisive est qu'elle contrevient à l'interdiction des Noirs et des Blancs de se côtoyer. Peu après, avec le guitariste Sipho Mchunu, il fait une tournée « secrète » dans les foyers de travailleurs migrants. Ce duo inattendu agite l'époque de la ségrégation raciale, divisant les partisans et les gens s'opposant au multi-culturalisme.

Très prolifique, Johnny Clegg a sorti 18 albums studio depuis ses débuts en 1976, ainsi que 6 albums live et un DVD... Cela équivaut à une « naissance » à environ tous les deux ans! Il a tenu le fort du duo Jukula pendant presque 10 ans, et ensuite, pendant 8 ans avec son trio Savuka. Citons, entre autres, sa chanson « The Crossing (Osiyeza) », qui a fait partie de la bande originale du film Invictus, en 2008. Le Mondial de Football 2010 a aussi sélectionné sa pièce «Ibhola Lethu » en tant qu'hymne. Véritable ambassadeur de la culture d'Afrique du Sud, son précieux talent est exporté à l'international.

D'ailleurs, en plus de tout ça – car oui, c'est possible – Johnny Clegg est professeur d'université et anthropologue. À souligner: il est récipiendaire de nombreux prix internationaux très prestigieux (13 International Awards et 8 South African Awards)! À la fois créateur visionnaire qui soigne les individus, donc, mais aussi combattant pacifique qui améliore les collectivités... Voilà un parcours unique, très inspirant.

Infatiguable recrudescence?

Somme toute, Roddy Quinn, le gérant de Clegg, a mentionné que celui-ci continuerait, entre autres, à travailler sur son autobiographie, et même à enregistrer un nouvel album... Parions que ce touche-à-tout ne s’essoufflera jamais!

Soyez témoin du moment où Johnny Clegg placera la dernière brique dans l'imposant mur de sa carrière anti-ségrégationniste... Procurez-vous votre billet sans tarder!