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Jusqu’au 15 avril 2023, la compagnie de danse Rubberband investit la scène du Théâtre Maisonneuve pour présenter Reckless Underdog, une pièce qui ose naviguer entre les genres. Les danseurs, ces « Opprimés Téméraires », redéfinissent ici les frontières entre le ballet, la danse contemporaine et le hip-hop pour ouvrir un champ des possibles, aussi bien artistiques que politiques.
Pièce anniversaire de la compagnie (qui fête ses 20 ans), Reckless Underdog pioche dans le vocabulaire des trois styles de danse qui ont marqué la démarche du chorégraphe Victor Quijada. À la recherche d’une élasticité permise par le mouvement, le chorégraphe s’est toujours opposé à la surcatégorisation des « danses ». Avec sa compagnie Rubberband il cherche à casser les codes et déconstruire les genres pour développer un nouveau langage chorégraphique qui transcende les frontières de chaque univers dansé. Reckless Underdog fait ainsi le bilan de vingt années de travail acharné pour tenter de détruire les murs qui séparent ces styles de danse.
Triptyque scénique, Reckless Underdog se divise en tableaux distincts où mouvements, décors et musiques construisent des mondes hétérogènes. Le spectacle s’ouvre sur des drapés soyeux qui rappellent l’élégance du ballet classique; ils tombent ensuite pour laisser une scène nue, où seule l’expressivité des danseurs et danseuses habille la scène; le décor final est agrémenté de barres métalliques suspendues, évoquant l'environnement urbain de la scène hip-hop. Avec Reckless Underdog, Quijada innove : la division, dont il cherche à se défaire, est source ici de déconstruction. Il sépare volontairement ce qu’on pourrait associer au ballet, au contemporain et au hip-hop pour dénouer l’esthétisme figé de chacun de ces mondes.
Chacune des parties présente une facette de l’exploration « élastique » de Quijada. Dans la première, le célèbre pas de deux figé par Marius Petipa (XIXe siècle) devient un projet de groupe où s’enchevêtrent rigueur du ballet, expressivité contemporaine et engagement du hip-hop. Communément dansé par un homme et une femme, le pas de deux comporte adage (rythme lent), variations individuelles et coda (morceau de bravoure sur un rythme rapide). Mais dans cette version revisitée par la compagnie, les codes classiques ne restent qu’allusifs; ils empruntent plutôt un chemin où l’en dedans, le déséquilibre et le porté masculin ont autant leur place qu’un « pas de bourré » ou un « saut de chat ».
Un solo saccadé et haletant fait figure de transition vers une deuxième partie émouvante où le collectif s’embrasse pour devenir une masse informe qui laisse émerger l’expressivité compulsive des danseurs et danseuses. L’un après l’autre ils se dégagent du groupe aspirant et aliénant et laissent échapper leur véritable caractère : leur témérité les entraine dans des Cypher finaux où ils exploitent les possibilités de l'improvisation hip-hop.
La fluidité entre les tableaux (et en leur sein) tient en ce que le langage de Quijada transparait dans le corps des danseurs qui maitrisent tous, avec brio, les trois styles chorégraphiques.
En déconstruisant ces trois styles de danse, la compagnie s’intéresse à l’origine historique et politique de la sur-codification chorégraphique. Alors que le ballet, sa rigueur et son élégance, se développe principalement dans la cour de Louis XIV, le hip-hop émerge des gravats du South Bronx des années 70, comme moyen d’expression marginal pour canaliser frustrations et violences. Si ballet et hip-hop opposent explicitement art élitiste et art urbain, le positionnement de la danse contemporaine s’avère quant à lui plus ambigu : on lui associe aussi bien la déconstruction de l’élitisme classique, qu’un élitisme qui lui est propre, dû à un vocabulaire corporel peu accessible au grand public.
Ces danses prennent vie dans des contextes sociohistoriques particuliers, leur pratique ne s’exempte donc pas des enjeux de classes, de races et de genres. Habillés de costumes indifférenciés, avec une simple déchirure sur l’épaule - symbole du marginal, ou du téméraire, ou des deux?- les danseurs de la compagnie Rubberband transcendent les styles chorégraphiques et font tomber les frontières entre classes sociales, déconstruisent les rôles attribués aux hommes et aux femmes et ouvrent la scène officielle à des interprètes racisés.
Si Victor Quijada fait partie de ces chorégraphes qui ont permis l’arrivée des danses urbaines sur la scène officielle… On se demande aujourd'hui si le ballet intégrera un jour la scène urbaine?
À la croisée des genres et des possibles, Reckless Underdog est encore jouée ce soir au Théâtre Maisonneuve. Pour toutes informations, rendez-vous ici.