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Après sa puissante pièce Unrelated, qui exposait les multiples violences perpétrées à l’égard des femmes autochtones, Daina Ashbee présente sa nouvelle création, « Pour », au Théâtre La Chapelle. Rassemblant les thématiques improbables des cycles menstruels et de la chasse au phoque, la jeune chorégraphe expose une œuvre vive et clairvoyante.
C’est dans le noir que le public pénètre la salle. Pendant que l’œil s’acclimate doucement à l’obscurité, des cris aigus et perçants, empreints de subtiles déchirures, parsèment les conversations. La pièce débute; une silhouette se discerne en arrière-scène. Puis, ça y est, elle est là. Juste là. Elle a le regard figé, angélique, empli d’un vide qui n’est pas étranger à la douleur.
Le corps de la danseuse Paige Culley est un corps svelte et symétrique, sans traces du passage du temps, sans tâches, sans cicatrices, sans ecchymoses. C’est un corps qui laisse entièrement la place au mouvement, à l’incarnation de la matière. Impeccablement interprétés, les thèmes sont abordés sans clichés, de façon abstraite et imaginative. Ils sont appuyés par un décor sans artifice, qui, avec un sol aux reflets bleutés, neutralise l’espace en évoquant l’eau et la glace. La douleur n’est jamais suggérée; elle se manifeste. Cette abstraction désamorce en partie la violence des secousses, de l’immobilité et des douleurs spasmodiques.
De par la lenteur de plusieurs mouvements, le corps devient sculptural. Pour un instant, la peau laiteuse de la danseuse devient marbre, fixé dans la douleur. Alternant d’un point d’appui inhabituel à un autre, elle tourne longuement au sol sur elle-même, étalant ainsi sur son corps l’eau qui recouvrait une partie du sol. Puis, surviennent les mouvements saccadés et répétitifs qui par moment deviennent insupportables à regarder.
Le corps est en mode survie. Ça vient des tripes, comme une bataille douloureuse qui provoquerait un état de transe. Incapable de produire des mots, l’être produit des sons inattendus, lorsqu'ils arrivent à s’échapper de son corps. Maintes fois les sons semblent plutôt s’y noyer, impropres à subsister à la souffrance et à la fatigue que l’endurance commande.
Une envolée magnifique et intense, pendant laquelle la danseuse semble voler et se noyer à la fois, dévoile enfin le sublime de ces cycles de douleurs. Accompagné d’un éclairage tamisé à la perfection, le corps de Culley oscille entre animalité et humanité, entre la vie et la mort. Les hurlements, fruits des entrailles, suggèrent une transformation. On reste avec la danseuse jusqu’à la fin. On ne peut la laisser tomber.
Puis, des moments plus légers enveloppent les déchirements, notamment lorsque la danseuse circule de gauche à droite de la scène, à dose de petits pas rapides, mais incertains. On se rappelle l’instabilité et l’incongruité de nos propres pas sur la glace, ainsi que les glissements imprévus que ladite surface peut provoquer.
La musique, signée Jean-François Blouin, s’immerge naturellement dans l’espace et invoque une ambiance hors du temps. Cosmique, sous-marine ou mystique.
L’intensité de la pièce, suggérée par la forme, la nudité et la répétition des mouvements, fait certainement écho à Unrelated. Daina Ashbee arrive néanmoins à créer un environnement renouvelé, le tout avec nuances et finesse.