En ce dimanche après-midi, le théâtre dansé, sauté et chanté du Groupe acrobatique de Tanger a fait rire les enfants et fait crier les dames : « Encore!! ». Halka est un spectacle dont la profondeur est abordée avec légèreté et les exploits acrobatiques sont réalisés en douceur et en simplicité. Ce portrait pluridisciplinaire et authentique d’un Maroc vibrant d’humanité a su toucher tous les spectateurs, peu importe leur âge ou leur origine. Découvrez le Maroc d’aujourd’hui à la TOHU : les représentations se poursuivent jusqu’au 9 février.

Halka est un spectacle décontracté, bien ficelé, qui fait rire tout en effleurant, en rappel, des thèmes importants : la place de la femme dans une société fortement patriarcale, le pouvoir économique ou politique, le combat et la mort, et surtout, l’importance du jeu, de la musique et de la danse. C’est ce dernier aspect que capteront les enfants puisque les thèmes plus sombres se trouvent doucement glissés en filigrane. 

Si les enfants réagissent si bien à Halka, c’est probablement parce que ce spectacle peint un portrait inspirant et touchant de l’homme-enfant : celui-ci qui sait basculer du costard aux singeries, qui retrousse ses manches pour se tenir la tête à l’envers et retire ses chaussures de cuir pour grimper en corps-à-corps sur ses collègues. L’homme-enfant se bat pour s’élever dans la hiérarchie ou gagner un simple combat de tir au poignet, entouré de ses congénères qui huent comme une armée de singe, puis il ramasse sombrement les corps morts ou se réjoui en chantant.

Le Groupe acrobatique de Tanger a présenté 14 artistes sur la scène de la TOHU. Précisons « artistes » et non seulement acrobates, acteurs, danseurs ou chanteurs… Ces 14 artistes sont apparus sur scène en silence, vêtus comme vous et moi, avec des corps comme monsieur madame Tout-le-Monde. Vraisemblablement entrés dans la trentaine ou la quarantaine pour la plupart, ils se sont assis de chaque côté de la scène et ont laissé l’appréhension s’installer dans le silence et l’immobilité. 

Sans presse, de scène en scène, ils ont déballé une à une leurs impressionnantes prouesses acrobatiques, toujours exécutées avec agilité et aisance. Mine de rien, l’homme et la femme ordinaires ont soudain performé un enchaînement innombrable de roues frontales, ou encore une tour humaine et une pyramide de 4 niveaux, le tout couronné d’un équilibre sur mains. 

Parmi les 14 artistes, il y avait deux femmes seulement, mais ces deux femmes représentaient toute la puissance féminine : elles rivalisent avec les hommes sans peine au niveau des acrobaties, remportent le tournoi de tir au poignet et dirigent leurs hommes du bout des doigts, désormais chef d’orchestre du poulailler.

Au spectateur intrigué, Halka dévoile, pour la première fois en Amérique du Nord,  la culture marocaine : l’usage de la djefna, une bassine de métal, la poésie, le chant et la musique populaire, et même le sable de la plage sur laquelle les enfants deviennent acrobates. Symbolique ou hasard, la circularité construit les scènes, du début à la fin. Dans l’esprit de continuité, Halka perpétue la culture et l’acrobatie marocaine à travers l’innovation.

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