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L’adaptation d’Étienne Lepage du célèbre roman L’Idiot de Fiodor Dostoïevski, sur les planches du TNM jusqu’au 18 avril, nous donnait une belle occasion de rencontrer la metteure en scène, Catherine Vidal, pour découvrir l’inspiration qui a guidé son heureux travail. Son expertise ayant été maintes fois confirmée dans de précédentes mises en scène, nous avions beaucoup de questions sur le cheminement de cette talentueuse artiste de théâtre.
Renaud Lacelle-Bourdon, Macha Limonchik, Rébecca Vachon et Frédéric Blanchette
(Crédit photo: Yves Renaud)
D’après mes recherches, tu es d’abord comédienne, finissante du Conservatoire en 1999, puis j’ai vu que tu avais été marionnettiste sur Ah, la Vache!, un excellent spectacle du Théâtre de l’Oeil.
Oui, comédienne, mais marionnettiste est un bien grand mot, dans mon cas. J’ai connu André Laliberté (directeur du Théâtre de l’Oeil) en finissant l’école, il est venu voir mon travail. Puis, il a eu besoin de quelqu’un qui savait chanter et qui s’intéressait à la marionnette. Alors, j’ai fait Ah la vache en tournée. Ensuite, j’ai travaillé avec Étienne Lepage sur Le cœur en hiver, un autre spectacle du Théâtre de l’Oeil, lui naturellement à l’écriture et moi à la mise en scène.
D’ailleurs, j’ai beaucoup « trippé » à faire « Ah, la Vache! ». Avant de me consacrer à la mise en scène, j’ai fait beaucoup de choses. Je ne pensais pas faire de théâtre musical en sortant de l’école. Et finalement, j’ai fait Les parapluies de Cherbourg et L’homme de la Mancha qui a suivi. Comme si la vie me poussait à des endroits... Je voulais faire de la mise en scène depuis toujours, mais je pensais que ça viendrait quand je serais plus vieille. Je me disais que je le ferais plus tard, comme Alice Ronfard ou Brigitte Haentjens. Je ne me voyais pas commencer déjà à la trentaine.
Catherine Vidal
Qu’est-ce qui nourrit et qui fait le plus vibrer l’artiste en toi: la comédienne, la marionnettiste, la chanteuse, ou la metteuse en scène?
Je me suis sentie à ma place dès que j’ai commencé à faire de la mise en scène. Ma formation en interprétation me permet de diriger les acteurs et de connaître, en bonne partie, les mots qui évoquent des choses pour faire travailler leur créativité. Ainsi, faire en sorte que ça vienne d’eux, plutôt que de leur demander d’exécuter quelque chose par mimétisme. De plus, avoir beaucoup observé les metteurs en scène travailler m’a beaucoup nourrie. Par exemple, voir René Richard Cyr travailler, et découvrir comment il fait, est vraiment fascinant. Donc, tout ce que j’ai fait avant a nourri ma pratique de metteuse en scène. Je me sens vraiment à ma place.
Est-ce que tu as le sentiment d’être meilleure metteuse en scène que comédienne?
Oh oui, vraiment! Je pense que j’étais une bonne comédienne, mais pas si extraordinaire... Par contre, je trouvais difficile de ne pas être capable de percevoir. Il y a des acteurs qui sont capables de voir de l’extérieur ce que leur corps fait comme dessin. Je n’avais pas cette capacité-là et ça me frustrait dans ma pratique de comédienne. Alors, maintenant en étant metteuse en scène, je suis l’œil qui regarde.
Est-ce qu’il y avait aussi une frustration de ne pas avoir le pouvoir de décider et de se dire, par exemple: à la place du metteuse en scène, je n’aurais pas fait ça comme ça?
Oh oui, c’est sûr. Quand on commence à se dire ça, je pense qu’il est temps de penser à faire de la mise en scène. Depuis toujours, je savais que j’allais y toucher. Dès mon premier contact, de façon naïve et inconsciente, dans mes jeux d’enfant, j’aimais organiser les choses, les spectacles qu’on faisait dans le sous-sol. Je me donnais le plus petit rôle pour pouvoir être libre d’organiser le jeu.
Étienne Lepage
(Crédit photo: Lucie Desrochers)
Et d’après ce que tu disais, L’Idiot n’est pas ta première collaboration avec Étienne Lepage.
Non, ça fait depuis 2008. À l’époque du Théâtre Catastrophe, un collectif issu du Nouveau Théâtre Expérimental, avait réuni quelques personnes qui ne se connaissaient pas pour créer, écrire et jouer un spectacle pendant l’été. On faisait dix représentations à la rentrée en septembre. Ça a été très intensif. C’est là qu’Étienne et moi nous sommes rencontrés pour la première fois, et on s’est vite rendu compte de notre capacité à créer ensemble. On s’est trouvé une forme de parenté. Il ne savait pas que je faisais de la mise en scène. Sur ce projet-là, il a pris le lead de l’écriture, parce que c’est un auteur à la base et j’ai pris le lead de la mise en scène. C’est là qu’on a pu se rencontrer humainement.
Après cette expérience, Étienne m’a demandé de mettre en scène un spectacle pour le Fringe: Acné japonaise et ça a super bien marché. Plus tard, en 2013 au Théâtre d’Aujourd’hui, on a fait Robin et Marion ensemble. Et Le cœur en hiver en 2015 au Théâtre de l’Oeil, une adaptation de La reine des neiges, un conte d’Andersen. Après coup, quand Lorraine m’a octroyé la bourse de mise en scène, au bout des deux ans je devais présenter quelque chose. Je me suis dit, j’aimerais faire l’Idiot. Renaud Lacelle-Bourdon m’avait déjà dit: « Un jour, j’aimerais jouer le Prince Mychkine ». Comme il y a beaucoup de personnages, je me demandais dans quel théâtre on pouvait faire ça. Quand l’opportunité du TNM est arrivée, je l’ai proposé à Lorraine Pintal, avec Renaud en Prince Mychkine, et avec Étienne. Comme on a déjà développé une relation de travail, j’avais un fort désir de travailler avec lui, et de son côté, faire l’adaptation l’enthousiasmait.
Renaud Lacelle-Bourdon et Simon Lacroix
(Crédit photo: Yves Renaud)
Donc, c’est toi le cœur du projet et il y a tout un paquet de gens comme Renaud qui vivent un rêve à travers ça?
Oui, et en plus, j’ai une équipe de plusieurs collaborateurs qui me suivent et font leur première conception au TNM. Étant donné que le temps d’entrer en salle était très court, je trouvais ça important de ne pas devoir aussi apprendre à connaître quelqu’un. Au niveau des conceptions, il fallait que ça se fasse rapidement et qu’on se comprenne vite. Alors, c’était important d’amener ma gang.
Lorraine Pintal a été vraiment cool! Et même pendant l’adaptation, on a eu un creux, et elle nous encourageait. Certaines idées l’ont rebutée au départ, par exemple le niveau de langage plus près du québécois, elle n’était pas certaine... Et finalement, ça allait.
Est-ce qu’Étienne et toi, vous êtes consultés durant son travail d’adaptation?
Au départ, Lorraine m’a proposé plusieurs textes déjà écrits, diverses adaptations de L’Idiot. Dans chaque texte, on pourrait dire qu’il y a déjà un ADN de mise en scène d’inscrit. Alors, comme j’aime bien partir du texte et d’y soutenir des éléments, d’y faire quelque chose de riche, j’aime bien travailler de concert avec l’auteur. Ainsi, on peut déjà discuter des conventions dans l’adaptation et sentir les prémices de la mise en scène dans le texte.
Paul Ahmarani et Renaud Lacelle-Bourdon
(Crédit photo: Yves Renaud)
C’est un texte que je connais dans son aspect dramatique et là, on est beaucoup plus dans l’humour. Ça souligne votre talent pour y arriver…
Il y en a quand même déjà un peu dans le texte. Ce n’est pas aussi franc que ça, c’est vrai. Mais, il y a quand même ce côté de la faune un peu ridicule, qui entoure ce trio-là, très shakespearien finalement. Dans les drames de Shakespeare, les jeunes premiers sont parfois dramatiques et le reste de la faune est plus comique. Pour nous, le roman est beaucoup basé sur l’égo, l’humiliation et l’orgueil. Le Prince Mychkine arrive comme dans une cour d’école où tout le monde se chamaille, et répond à l’offense par une offense. Et lui n’embarque pas du tout dans cette mécanique-là. Alors, ça désarme tout le monde. Cette notion de personnage qui veut s’élever et trébuche est très humaine.
Donc, on a passé environ cinq mois juste à discuter de la perception du roman et des conventions théâtrales. Je me disais: à la limite, j’aimerais ça qu’on s’adresse au public, qu’on enlève le quatrième mur. En travaillant cette matière-là, j’avais peur de tomber dans du théâtre vieillot. On a des a priori esthétiques sur les shows russes, on se dit: on va voir du bois, de la fourrure, ça va être sombre, l’éclairage un peu à la chandelle... Les clichés, en fait. Alors, on s’est demandé comment faire fi de tout ça et proposer quelque chose pour les Québécois d’aujourd’hui.
On a donc eu beaucoup de discussion sur ce qu’on pouvait retirer du roman, qui était universel, et gommer un peu ou mettre en second plan, tout ce qui était enjeu plus vieillot: les filles à marier, ce qui faisait référence à la Russie, etc. Alors, on a situé l’action dans un lieu universel.
Renaud Lacelle-Bourdon, Frédéric Blanchette, Évelyne Brochu et Rébecca Vachon
(Crédit photo: Yves Renaud)
Voilà entre autres, ce qui fait de cette pièce, un excellent spectacle à voir au TNM, jusqu’au 18 avril!