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Le Théâtre d’Aujourd’hui offre jusqu’au 18 mai six supplémentaires du spectacle Je viendrai moins souvent, première oeuvre écrite et interprétée par Camille Paré-Poirier dans le cadre d’une résidence de deux créations.
Adaptation du ballado de la même autrice, Quelqu’une d’immortelle, diffusé à Radio-Canada plus tôt ce printemps, la pièce est une autofiction douce-amère, tissée d’archives sonores récoltées soigneusement au fil des très nombreux moments partagés entre Camille et sa grand-mère Pauline au cours des quatre dernières années de sa vie (de 2016 à 2020). Paré-Poirier, mine de rien, y accomplit beaucoup de choses, qui ne sont pas des moins périlleuses : de façon poignante, elle réussit à rendre justice à l’irréductible singularité d’une femme, tout en ouvrant délicatement la réflexion vers les questions vertigineuses, politiques et existentielles, que suscite la mort.
Le spectacle est sans doute d’abord et avant tout un long hommage rendu à Pauline, personnage à part entière, qui se dévoile lentement pour nous par sa voix belle, usée, invitante et familière comme un chemin de terre battue parcouru mille fois pour rentrer à la maison. Brisée par la solitude, la perte de repère et la souffrance, cette voix demeure celle d’une héroïne, qui livre le combat absurde dont jamais personne n’est sorti victorieux. Devant l’ennemi impitoyable, dans cette déroute absolue qui s’abat sur elle fatalement, elle demeure fière, forte, pleine d’esprit, d’humour, de sagesse et de compassion. Même dans le délire ordinaire et invraisemblable de la démence qui nous guette tous, se glisse un bon sens implacable. Le contraste, comme celui des chansons d’amour qui, comme nous dit Pauline, sont toujours tristes et gaies, nous fait « rire et pleurer » : « T’es nounoune, si la soupe est bonne, ça veut pas dire que tout est bon. Ça a jamais voulu dire ça ». Et si Pauline demeure bel et bien tout au long héroïne, jeune jusqu’au bout de la vieillesse, le monument érigé à sa gloire est loin d’être une statue de marbre grecque. L’ambivalence et les aspérités sont bien palpables, et la vénérable dame, face au sort qui s’acharne sur elle, devient parfois véritablement « en cris ».
Vous aurez compris, par les dates des dernières années de sa vie, que le spectacle nous convie également à un retour douloureux sur la véritable horreur subie par les personnes âgées et leurs proches au cours de la pandémie. Difficile d’imaginer pire que le fait de passer ses journées au lit, seul, souffrant, fragile, confus, et de finir ses jours sans chaleur et sans amour auprès d’étrangers habillés en cosmonautes, contraints par une structure productiviste d’administrer les soins comme des ouvriers de l’usine Ford de la mort. Le pire c’est que ce qui s’est révélé dans la mise au jour de ce sort réservé aux vieux pendant la pandémie n’est, comme chacun sait, que l’amplification d’une situation qui était pathologique bien avant et qui l’est toujours.
De bon droit, l’oeuvre ne constitue sans doute pas une thèse philosophique ou une proposition politique sur les questions que suscitent cet état de fait. Elle s’ouvre tout de même sur des pistes intéressantes, que l’autrice livre avec franchise, justesse et retenue. Mais ce qui est le plus significatif, au fond, c’est peut-être ce que l’œuvre fait, et qui fait un grand bien en plus de faire réfléchir : issue d’un face à face tendre et cru avec la fin de la vie, elle nous y convie, pour une fois, le temps du spectacle. Elle réfléchit et performe ainsi d’elle-même l’esquisse d’une relation plus saine avec la vieillesse et la mort, épouvantails le plus souvent physiquement et métaphysiquement balayés hors de notre champ de vision.