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Face à un danger, un besoin ou une peur, la majorité des êtres humains réagissent impulsivement, dominés par leur instinct de survie, leur instinct animal, sans réfléchir aux conséquences de leur action Mais il existe des cas plus grands que nature, plus graves, des personnes qui sont péniblement acceptables et parfois même humainement impensables. Dans son premier roman, « La bête à sa mère », sorti en 2015, l’auteur et travailleur social David Goudreault relève le défi de porter un tel cas, un tel homme-animal au bout de sa plume. Une vraie bête en cage. Troublante.
Il est difficile d’admettre que de tels personnages existent et pourtant, la Terre en est abondamment peuplée. Vous n’avez qu’à lire les journaux quotidiennement, regarder les panneaux de publicité dans les stations de métro ou encore écouter tous les jours les bulletins de nouvelles, pour constater l’ampleur des cas répertoriés. Et j’insiste sur « cas répertoriés », car il y en a beaucoup d’autres en liberté. Qu’on catégorise ces personnes par des maladies mentales ou tout autre désordre déviant, il n’en demeure pas moins que leur existence est déroutante.
« La bête à sa mère », de David Goudreault, dépeint un homme, animal, enfant, adulte, un être à la fois tellement « ordinaire » et tellement dénaturé. Loin de se contenter d’écrire une histoire autour du personnage principal, le travailleur social de formation a également dépeint tout l’environnement autour du personnage, ses pensées, sa manière de réfléchir et d’agir et les conséquences de ses actions.
Le lecteur est donc témoin du « dedans » et du « dehors » de l’homme devenu bête irresponsable, borderline, narcissique, avec troubles de l’attachement et de conduite et oppositionnel, parsemé d’un trouble de toxicomanie et d’alcool. L’auteur a-t-il exagéré le cas imaginé? J’ose vous dire qu’en tant qu’intervenante sociale, j’ai entendu des histoires similaires. Ahh.
Animal ou monstre?
« Mieux comprendre que les animaux sont souvent régis par leurs instincts permet de voir que l'animal n'est souvent pas un monstre, il essaye tout comme nous de survivre par les moyens dont il dispose. » - bestioles.ca
Dans « La bête à sa mère », on ne parle nullement d’un animal, mais il demeure intéressant de tracer un parallèle entre les réactions du personnage principal et celles d’un animal en danger. L’homme créé par David Goudreault, a été témoin des suicides de sa mère dès l’âge de quatre ans et fut séparé d’elle à sept. Sans famille auprès de lui, il oscillera entre le Centre Jeunesse et plusieurs familles d’accueil qui feront ce qu’ils peuvent pour lui.
Mais on ne lui apprendra jamais à être. Alors il sera ce qu’il peut. Il s’imaginera une vie qui sort de la réalité, aura des attentes démesurées, des rêves irréalistes. À force d’imaginer, le petit garçon se ment, s’invente, se trouble lui-même. Il n’y a plus de différence entre le rêve et la réalité. Tout est vrai du moment qu’il croit que c’est vrai.
« De toute manière, quand je disais la vérité, on ne m’écoutait pas. J’étais un malentendu. Pourtant, j’y mettais tout mon cœur. Il m’arrivait même de me convaincre. Je me faisais confiance. C’est important de croire en soi, surtout quand on se ment! »
Si l’imagination peut sauver bien des vies, la « bête » en est une énorme exception. Dès son jeune âge, la bête se défoulera sur plus petit qu’elle et les chats sur son passage écoperont. Âmes sensibles et amis des chats, vous aurez le cœur sur le bord des lèvres bien souvent. L’enfant n’étant qu’un aperçu de ce que deviendra l’homme, on peut craindre le pire pour la suite. Imaginez quand la bête se fait employer dans une société protectrice des animaux.
Sa mère, sa quête, son obsession
La « bête » devient homme manipulateur, prêt à tout pour atteindre son objectif; retrouver sa mère. Tous ceux qui les ont séparés seront inscrits sur sa liste de vengeance. Lorsqu’il croira avoir retrouvé sa mère, plus rien ne l’arrêtera.
« J’étais fier de ma mère. (…) C’était la meilleure serveuse du restaurant sans contredit. Elle marchait plus vite, prenait des commandes dès que les clients fermaient les menus et ne se désarmait jamais de son sourire. Elle était belle, ma mère. »
Mais est-ce bien sa mère? Il en est persuadé.
Prenant ses fantasmes pour la réalité, l’altération du jugement de la « bête » le porte à se croire tout puissant et plis intelligent que les autres. Égocentrique, ses besoins passent avant tout que ce soit le sexe, la drogue, l’argent, l’alcool ou l’affection. Il obtient ce qu’il veut selon ses désirs du moment. L’homme devient criminel, se disant victime « du système », refusant de percevoir son rôle dans l’action qu’il pose et d’assumer les conséquences.
Il accumule les troubles relationnels et éprouve de plus en plus de difficulté à fonctionner en société. Il n’acceptera aucune contrainte, aucun engagement à long terme, il refusera de mener une vie banale et de se soumettre aux règles que l’on veut lui imposer.
Plein de colère et de ressentiment, il agresse animaux et humains. Pas de remord. Pas de culpabilité. Et bien que le personnage suscite parfois notre empathie, les crimes qu’il commet balaient rapidement toute notre affection.
L’auteur David Goudreault a réussi un coup de maître en écrivant sur un tel énergumène. La lecture est pesante, non parce que l’écriture est redondante, mais parce qu’on peine à imaginer tout ce bagage en un seul être humain.
La plume de David Gaudreault est unique, sarcastique, dotée d’un humour noir qui ne plaira pas à tous, mais qui lui a permis de se démarquer dans le monde littéraire. Pas surprenant qu’il ait remporté la Coupe du monde de slam poésie à Paris en 2011, créé deux recueils de poésie et composé des chansons mises sur album. Son écriture est un mélange de styles qui fracasse les mœurs et déjoue les tabous.
Un livre à lire avec ouverture et empathie et un petit verre de Perrier.
La bête à sa mère
David Goudreault
Éditions Stanké