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Dans la série d'entrevues Questions réflexions, Charles Moquin rencontre des personnalités de la scène culturelle et les interroge sur leurs valeurs, leurs principes individuels ou sociaux, leur vision du monde, sur des questions de société ou des sujets philosophiques.
ENTRETIEN AVEC STÉPHANE CRÊTE
Comédien, auteur, animateur et metteur en scène, Stéphane Crête est un touche-à-tout polyvalent qui s’intéresse à toutes les formes de création. Il navigue avec autant d’aisance dans les productions grand public (Dans une galaxie près de chez vous, Tactik, Les étoiles filantes) que dans le théâtre expérimental.
Est-ce que l’on doit être passionné pour bien performer? Un bon technicien non passionné peut-il y arriver aussi?
Ça prend un heureux mélange de talent, de passion et de technique. C’est la passion qui permet de maintenir la danse, qui donne le plaisir de rester dans cette aventure-là. Cela reste quand même mystérieux.
Que pensez-vous des gens qui jouent avec une oreillette, ou qui chantent en playback?
Je l’ai déjà expérimenté dans un studio de télé où il n’y avait pas de moniteur. C’était étrange. Il y avait quelque chose de faux pour moi. Si c’est une béquille scénique, oui ça m’agace un peu. Par contre, comme expérience, je pourrais monter un spectacle dans lequel les comédiens ne connaîtraient pas leur texte et le découvrirait au fur et à mesure, en l'entendant dans l’oreillette.
Recherchez-vous davantage la ressemblance ou la différence, dans vos relations personnelles et dans votre vie en général?
Je cherche davantage la différence. Auparavant, je me sentais tellement marginal en tant qu’artiste que je recherchais les gens qui me ressemblaient. J’avais crée une tribu, si on peut dire, avec ma compagnie de théâtre. Puis, je me sentais en autarcie et en manque d’hygiène, comme si je ne me branchais pas à d’autres réalités. Donc, j’ai commencé à faire le processus opposé et à rechercher la différence. D’autres pensées, modes de vie, réflexions, valeurs. J’avais besoin de points de vue différents qui apparaissent.
Est-ce que l’habillement vous en dit long sur les gens?
Je trouve que cela donne bien peu d’information. J’ai déjà côtoyé des millionnaires sans le savoir. Mais étonnamment, dans la nudité, on peut faire la distinction entre le corps d’un ouvrier et celui d’un intellectuel.
Êtes-vous plutôt dans l’acceptation ou la confrontation, aux gens, au temps, aux insuccès?
Je suis davantage dans l’acceptation. Me contenter dans la vie est quelque chose de très apaisant. Ce n’est pas un contentement misérable, de victime. Actuellement, je mange un croissant qui n’est pas super bon, mais c’est ce qui m’est offert et je m’en contente... Plutôt que d'aller chercher le meilleur ou ailleurs, revendiquer. Cela m'amène une certaine paix.
Souffrez-vous de la rage au volant?
Non. Plus jeune, je me suis beaucoup défini par la négative. Je regardais les gens et je me disais, ça, je n’aime pas ça. Je ne veux pas faire ceci, être comme cela. La rage au volant, ça n’a pas l’air sain, pas nourrissant. Ça semble épuisant et ce n’est pas agréable à regarder.
Qu’est-ce qui prime pour vous au restaurant, la gentillesse du service ou la qualité de la nourriture?
J’avoue que je suis très séduit lorsque le service est de qualité. C’est la relation humaine qui est intéressante. On a besoin de beaucoup d’écoute pour faire ce métier. Au début de ma carrière, avant que les choses fonctionnent, je l’avais même envisagé. Tout ce qui a trait à la sociologie, à l’anthropologie m’intéresse.
Êtes-vous davantage attiré par des gens pour qui la vie coule de source, ou par ceux qui sont davantage tourmentés?
J’ai l’impression que je me donne l’illusion que je suis attiré davantage par les gens éveillés, accomplis, pacifiés. Mais en réalité, les malmenés de la vie m’intéressent beaucoup.
Jusqu’où la liberté d’expression, selon vous, peut-elle aller?
C’est délicat ces temps-ci. On a vraiment des sujets explosifs autour de cette thématique-là. C’est très ambigu. Savoir avec quoi il est pertinent de jouer, ou de ne pas jouer. J’ai vu récemment que l’on a censuré un article d’une revue parce que l’on parlait d’un viol, et que l’on ne voulait pas traumatiser certains lecteurs qui auraient vécu la même chose. J’en conclus que l’on ne pourra plus parler de traumas, de drames. En même temps, il y a un soin, une façon de faire qu’il faut adopter. Je ne sais pas où je me situe dans tout cela. On manque peut-être de ces grandes fêtes traditionnelles, où le pauvre devient le riche, le riche le pauvre, le fou le maire et on purge tout cela.
Votre but dans la vie est-il d’être heureux?
C’est d’être en paix, je dirais. Je suis plutôt dans une quête de compréhension des choses, que dans une quête de bonheur.
Le dicton « Le malheur des uns fait le bonheur des autres » ou vice versa s’applique-t-il à vous ?
Je pense que c’est bien de relativiser notre condition. Il y a plein d'occasions, spécialement en voyage, de le faire. Et j'ai la même attitude de contentement mentionnée précédemment.
Qu’est-ce que l’amour?
Les Grecs décortiquent l’amour: Éros, Àgapé, Philia. L’amour peut prendre toutes sortes de textures, de dimensions. On peut être en amour d’amitié. Nous, les occidentaux, avons tendance à cristalliser l’amour en une seule perspective de lien à l’autre. C’est une question que je porte en moi. Où est-ce que le cœur s’ouvre? Pour quelles raisons? Est-ce qu’il y a des attentes? Quelles sont les attentes? Un amour désintéressé? Un amour qui cherche à combler quelque chose?, etc.
L’être humain est-il foncièrement bon ou mauvais?
Je crois qu’il est naturellement bon. Mais c’est une courbe très lente depuis l’homme de Néandertal. On reste chargé et porté de notion de survie, de compétition, de domination et de mesquinerie. On doit explorer ces zones d’ombre, sinon on ne pourra que faire semblant que l’on est bon.
Seriez-vous prêt à faire condamner un innocent pour sauver un ami coupable?
C’est une grosse question d’enjeux moraux et de contexte. Où? Quand? Comment? Pourquoi? Et d’être en paix après.
Est-ce que le suicide assisté devrait être accessible à qui en ressent le besoin, sans autres considérations?
Je serais très curieux de voir ce que cela donnerait si on rendait la chose possible. Il y aurait les dépressions passagères à gérer.
Croyez-vous que Bertrand Cantat doit continuer à s’exprimer artistiquement?
Je crois qu’il est libre de s’exprimer artistiquement et nous de l’écouter ou non. Moi, je ne l’écoute pas. Si seulement nos vérités pouvaient cohabiter.
Un défaut, un vrai?
Je peux manquer de discernement dans certaines situations.
Que pensez-vous de la recherche sur les cellules souches?
Je n’ai pas vraiment d’idée. C’est un sujet sur lequel je ne me suis pas penché. Je sais qu’il y a beaucoup de questions d’éthique dans ce domaine. Pourquoi stocke-t-on tous les tests d’ADN? Il y a plein d’ambivalences morales à travers tout cela.
Estimez-vous que l’homme doive continuer de protéger la biosphère ou se modifier pour vivre dans un nouvel environnement (exemple, par le transhumanisme)?
Parfois, je capitule concernant la biosphère. C’est peut-être l’histoire de notre évolution de se rendre à une forme de transhumanisme. Mais cela pourrait être un passage de tourments, de violence et de désespoir.
Croyez-vous à une vie après la mort?
Oui. Je crois qu’on est composé de plusieurs existences à travers lesquelles on construit un chemin. Et au bout de ce chemin, il y a quelque chose qui m’attire, mais je ne sais pas ce que c’est.
Avez-vous peur de la mort?
J’ai surtout peur de la souffrance. Par contre, j’ai été entouré de personnes qui sont décédées d’une façon très pacifiée, prêtes, disponibles. C’est à cela que j’aspire. Arriver devant ce saut-là, et dire oui. Aller voir ce grand mystère qu’il y a de l’autre bord. Mais j’aurais sans doute ma propre terreur et mes propres angoisses.
Est-ce qu’il y a un avenir pour le français au Québec?
Oui. Il y a un noyau dur, qui croit suffisamment à l’importance et la préciosité de cette langue. Mais cela ne va pas sans défi.
Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Nous partons en tournée à travers le Québec avec la pièce Manifeste de la jeune fille d’Olivier Choinière. J’ai aussi un projet plus personnel, c’est une pièce que j’ai écrite et qui sera mise en scène par Didier Lucien. Je vais la jouer au mois de janvier prochain à L'Espace Libre, elle s’intitulera Mauvais goût.