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Dans la série d'entrevues Questions réflexions, Charles Moquin rencontre des personnalités de la scène culturelle et les interroge sur leurs valeurs, leurs principes individuels ou sociaux, leur vision du monde, sur des questions de société ou des sujets philosophiques.
ENTRETIEN AVEC MONIQUE PROULX
écrivaine et scénariste
Est-ce qu'il faut être passionné pour bien performer? Un bon technicien non passionné peut-il y arriver aussi?
J’appellerais cela davantage de l’enthousiasme que de la passion. C’est l’enthousiasme qui propulse vers le haut, donc vers une sorte d’accomplissement maximal. La passion peut nous amener à faire des choses pour les mauvaises raisons, comme pour le désir d’être célèbre, ou célébré… Tandis que l’enthousiasme est vraiment connecté à ce que l’on est en train de faire.
Que pensez-vous des gens qui jouent avec une oreillette ou qui chantent en playback?
En tant que spectateur, j’aime sentir que les performers se mettent en péril. Je crois qu’ils peuvent le faire avec ou sans oreillette. Si on joue sciemment avec les instruments et la technique et que l’on arrive à un résultat qui est vraiment percutant grâce à cet espèce de faux-fuyant, et bien tant mieux. De toute façon, aussitôt que l’on est dans les arts, on est dans le faire semblant, on est dans la fabrication des choses.
Recherchez-vous davantage la ressemblance ou la différence dans vos relations personnelles et dans votre vie en générale? Et le monde vers quoi devrait-il tendre selon vous?
A vrai dire, sous les dissemblances apparentes, je suis toujours à la recherche de ce que l’on partage. C’est quasiment mon sujet principal lorsque j’écris. Je suis toujours à la recherche du territoire commun. C’est ce qui me permet, entre autres, d’investir des personnages qui sont absolument différents de moi, et d’avoir l’impression de rendre vraiment leur intimité. Mais cela ne veut pas dire que je ne vois pas les énormes différences qui existent dans le monde. Cela fait d’ailleurs partie du charme de l’humanité. Mais je crois que l’humanité repose principalement sur des énergies très semblables. C’est ce que je trouve passionnant, de fouiller et de toujours le retrouver, ce terrain commun. D'ailleurs Montaigne disait: ‘’Rien de ce qui est humain ne m’est étranger’’. Même si on s’intéresse par exemple à l’État Islamique, on peut retracer les causes qui l’ont engendré. On n’excuserait pas, mais on comprendrait. La folie aussi est compréhensible.
Est-ce que l'habillement en dit long sur les gens?
Personnellement, j’aime bien les vêtements. Je trouve d’ailleurs que ça manque souvent de fantaisie dans l’univers du vêtement, les hommes, notamment, s’habillent de façon extrêmement "drabe", avec toujours des couleurs sombres. Le vêtement est une espèce de fête pour le regard des autres. Comme une plate-bande de fleurs. Mais je ne vais pas aborder quelqu'un parce qu’il est bien habillé. Je vais m’approcher de quelqu'un dont je vais sentir l’esprit libre. Parfois les vêtements reflètent cette liberté. J’aime lorsque quelqu’un exhale ce parfum.
Êtes-vous plutôt dans l'acceptation ou la confrontation aux gens, au temps, aux insuccès?
Moi, je suis d’un réalisme joyeux. Je m'accommode bien des situations. Même celles qui semblent horribles à d’autres. Je ne suis pas dans la confrontation. Je ne trouve pas cela intelligent.
Souffrez-vous de la rage au volant?
Je sens mon impatience parfois. Mais la rage au volant, c’est plutôt une affaire d’homme. Les femmes, même, ont tendance à conduire lentement... c’est peut-être la raison pour laquelle la rage au volant est une affaire d’homme! La rage reste toujours suspecte. Lorsque les premiers Français sont arrivés ici, ils ont découvert avec stupeur que les Amérindiens ne s’emportaient pas. Les Amérindiens disaient que celui qui se fâche n’a point d’esprit, puisque ça l’amène fatalement à perdre la santé. Voilà une sagesse et une connaissance dont on devrait s’inspirer.
Qu'est-ce qui prime pour vous au restaurant, la gentillesse du service ou la nourriture?
Tout cela forme un tout, bien sûr. Dans un resto, un plat succulent servi par des gens désagréables ne m’amènera pas à revenir. Le contraire se pourrait, par contre. Il m’arrive de fréquenter de petits restos très ordinaires, juste parce que l’atmosphère est sympa.
Croyez-vous que les gens sont plus intéressants dans un bar fumeur et alcool que dans un bar non-fumeur sans alcool?
Je ne fréquente pas les bars. Mais bientôt les gens vont pouvoir fumer -sur la terrasse! -une petit joint qui créera peut-être des ouvertures d’esprit inattendues.
Jusqu'où la liberté d'expression selon vous peut- elle aller?
On ne vit pas seul. Il faut se donner des balises pour préserver une relative harmonie. Et aussi il faut accepter les conséquences de ses actes, dictés par "notre" liberté d’expression. Par exemple, injurier Mahomet dans le contexte actuel, je ne l'interdirais pas, mais je ne trouverais pas cela intelligent.
Votre but dans la vie est-il d'être heureuse?
Oui. Enfin une réponse simple.
Est-ce que le bonheur est relié au malheur des autres?
Le bonheur par comparaison est davantage pour moi un plaisir fugace que du bonheur. Le bonheur est un état d’apaisement, de contentement, qui fait que l’on n’a pas besoin de s’élever au dessus de quiconque.
Qu'est-ce que l'amour?
Pour moi, l’amour avec un immense A serait très similaire au bonheur: le sentiment que les barrières sont tombées entre deux êtres; entre moi et le paysage. Il n’y a plus de séparations dans l’amour.
L'être humain est-il foncièrement bon ou mauvais?
Foncièrement bon. Je suis très cohérente, comme vous voyez.
Croyez-vous que vous seriez prête à faire condamner un innocent pour sauver un ami?
Qu’est-ce qui subsisterait de l’amour ou l’amitié, après avoir posé un geste comme celui-là? ... Aucune relation ne peut se fonder sur ce type de prémisse. Tu ne peux pas faire ça, un point c’est tout.
Est-ce que le suicide assisté devrait être accessible à qui en ressent le besoin sans autres considérations?
Si tous les dépressifs ne se mettaient pas alors à se suicider, je serais portée à dire "pourquoi pas". Mais cela ne pourrait advenir que dans une société qui a énormément de maturité, qui d’abord sait comment offrir aussi un support psychologique, pour ceux qui traversent simplement une mauvaise passe. Une société qui saurait aussi faire valoir, au préalable, l’enchantement qu’est la vie.
Croyez-vous que Bertrand Cantat peut continuer à s'exprimer artistiquement? Iriez-vous le voir si son art vous intéressait?
Je trouve qu’il a fait son temps, il a payé. Je suis de ceux qui croient complètement au pardon. Alors oui, j’irais le voir, si son show m’intéressait.
Un défaut un vrai?
Je peux être très directive, voire contrôlante. Il faut que je me surveille. Mais j’ai noté que j’agaçais surtout ceux qui étaient aussi contrôlants que moi...
Que pensez-vous de la recherche sur les cellules souches?
Une partie de moi est persuadée qu’il faut pousser la science le plus loin possible pour améliorer la santé humaine. L’autre partie attache autant d’importance à ce qui n’est pas humain (la nature, les bêtes, la planète) qu’à ce qui est humain. Donc, l’un ne doit pas nuire à l’autre, et l’utilisation de la recherche doit en tenir compte.
Croyez-vous que l'homme doit continuer de protéger la biosphère ou se modifier pour vivre dans un nouvel environnement ?
Quand j’étais adolescente, je voulais être chercheur en chimie. J’adorais la science. La recherche, c’est comme de la poésie. Les questions d’éthique ou de morale n’ont pas à se poser chez les chercheurs. C’est à un autre niveau, du côté des pouvoirs, des politiques, que les cas de conscience doivent exister. Par exemple, je ne crois pas à la fabrication d’une nouvelle entité, éventuellement apte à vivre ailleurs, disons sur Mars! On n’a pas réalisé que l’on faisait partie d’un écosystème. Comme si un arbre ne voyait pas qu’il fait partie de la forêt. Si l’écosystème pète, ben l’humanité pète aussi. Et si jamais il est trop tard, ce n’est pas plus grave que ça, on disparaîtra simplement comme espèce.
Croyez-vous à une vie après la mort?
Je crois de moins en moins à la mort. J’ai eu la chance il y a longtemps de commencer à m’intéresser de très près à tout ça: la mort, la vie, et aussi, surtout, l’identité véritable. Qui suis-je? J’ai vraiment investigué cette question-là sans faux-fuyants. Cela m’amène de plus en plus à voir ce que je ne suis pas. On revendique comme identité des névroses, des tendances, des formes qui sont fatalement passagères. On s’identifie totalement à la petite manifestation physique, alors que ce qu’on est s’avère infiniment plus vaste. La vie ne meurt pas. Elle ne fait que changer de forme. Si l’on s’identifie à ce qui observe la transformation physique, au lieu d’être la transformation physique, le problème de la mort ne se pose plus. Et la vie après la mort n’a aucune pertinence. La mort fait partie de la vie. Je m’excuse de ne pas pouvoir répondre plus rapidement et simplement.
Avez-vous peur de la mort?
Je souffre davantage de la mort des autres que de l’éventualité de celle de Monique Proulx. La seule peur fondamentale de l’humain, c’est la peur de mourir, qui prend toutes sortes de formes. Le grand défi de l’être humain c’est d’apprivoiser la peur. Il n’y a rien de plus naturel que la mort du corps. D'ailleurs, il devrait y avoir des cours à l’école dès l’enfance, pour enseigner que le corps est périssable, afin que les humains cessent de voir la mort physique comme une catastrophe.
Est-ce qu'il y a un avenir pour le français au Québec?
Je pense vraiment que oui. Plus le français sera menacé, plus surgiront des forces de résistances intenses. Mais bien sûr il faut demeurer vigilant. Chacun de nous a une part de responsabilité dans la vie et la démonstration de la beauté du français. J’aimerais personnellement que la loi 101 soit appliquée aux cégeps, pour entre autres que l’on ait accès en français aux cours de philosophie. Le français est une langue merveilleuse pour passer des idées, un instrument extraordinaire pour exalter la beauté.
Sur quoi travaillez-vous présentement?