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Jean Sioui, auteur wendat du clan de l’Ours signe son quatrième recueil de poésie. Des morceaux de temps se dévoile comme un voyage poétique sans précédent. À travers des vers libres dépourvus de ponctuation et d'une structure dénuée de chapitres, l'auteur plonge le lectorat dans les méandres de ses pensées, offrant une expérience immersive au cœur de l'intime.
Ce recueil explore le rapport de force qui lie les Premières Nations aux Québécois blancs. « Je ne te demande pas de te déposséder pour moi mais de partager avec moi. Reconnais-moi et respecte-moi. Je sais que l’on peut marcher ensemble », peut-on lire dans le prologue. Son appel au partage suggère une vision de coexistence où chaque communauté peut mutuellement contribuer et bénéficier l’un de l’autre.
Le choix du vers libre confère une liberté expressive unique aux poèmes de Jean Sioui. En l'absence de contraintes formelles, les mots prennent vie dans une danse rythmée, permettant au lectorat de ressentir la poésie comme une pulsation intime. Cette approche permet aux émotions de jaillir naturellement, créant ainsi une connexion profonde entre le poète et son public.
L'absence de frontières entre les phrases crée une proximité qui donne l'impression de naviguer dans les méandres de l'esprit de l'auteur. Ce choix stylistique confère une authenticité à l'œuvre, offrant une vision brute et sincère des sentiments et des réflexions de Jean Sioui.
Les poèmes de Sioui explorent les relations entre les Premières Nations et les Québécois blancs, dépeignant un tableau complexe de l'histoire et de la dynamique contemporaines. Les comparaisons poétiques évoquent des images puissantes, mettant en lumière les déséquilibres de pouvoir persistants. L'auteur - tel un observateur averti - examine les impacts de l'arrivée des colons, les pensionnats, le traitement par la société des communautés autochtones et du gouvernement, via les lois oppressives qui continuent d'étouffer les communautés autochtones.
« Les remords flambent les souvenirs
avant que les soifs ministérielles
ne se couchent sur le papier environnemental
comme une nouvelle loi des indiens »
Jean Sioui tisse habilement la trame poétique de son recueil avec des fils complexes de la religion, dévoilant les cicatrices laissées par le catéchisme imposé aux membres des Premières Nations. Le poète revient sur la lutte perpétuelle pour la préservation de la spiritualité autochtone face à l'ombre persistante du colonialisme religieux.
Le soleil, l'eau et la terre émergent comme des motifs récurrents, symbolisant la connexion innée des Premières Nations à la nature. Ces éléments deviennent des métaphores puissantes, évoquant à la fois la beauté de la tradition et les souffrances infligées par la perte de leurs racines. Sioui peint le paysage poétique de son peuple avec des couleurs vibrantes, dévoilant ainsi la résilience qui émane de la reconnexion avec ces éléments fondamentaux.
« On nous a voulus
flaque d’eau
étendue sur le sol
Nous sommes ruisseau
torrent
rivière
fleuve et mer
Les poumons remplis de culture
sur la terre de la Grande Tortue »
Au fil des vers, l'auteur explore la douleur de l'arrachement forcé des racines autochtones, tout en témoignant de la persévérance des communautés à réparer ces liens brisés. La poésie de Sioui devient une voix pour la transmission intergénérationnelle, où chaque mot devient une pierre réparatrice dans la reconstruction des identités autochtones. Chaque poème devient un acte de résistance, une tentative courageuse de guérir les blessures du passé et de forger un avenir empreint de fierté et de réappropriation culturelle.
« Que restera-t-il du territoire
sinon des réserves et des traités
qui ennuient nos enfants à mourir »
À travers ses vers, Jean Sioui réussit à capturer l'essence intime des luttes en offrant une œuvre poétique qui résonne profondément. L'auteur offre un regard profond sur l'histoire, les injustices et les luttes des Premières Nations. Ce recueil, ancré dans la réalité des expériences autochtones, constitue une contribution remarquable à la littérature contemporaine, invitant le lecteur à réfléchir sur les échos ancestraux qui résonnent encore aujourd'hui.
Des morceaux de temps de Jean Sioui est disponible en librairie depuis le 15 janvier dernier aux éditions Mémoire d'encrier.