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« Est-ce qu’on doit toujours dire la vérité ? Est-ce qu’on est tenu de dire ce qu’on pense en tout temps ? Quelle dose de mensonges faut-il pour fonctionner en société ? »
Le directeur artistique du Théâtre Point d’Orgue, Louis-Karl Tremblay, tente de répondre à ces questions en signant ici l’adaptation et la mise en scène de ce texte tout aussi jouissif qu’amer, écrit par l’autrice allemande Rebekka Kricheldorf, Fraülein Agnès, en 2017.
Dans cette réécriture contemporaine et féminine du Misanthrope de Molière, adaptée pour un public québécois aux références artistico-montréalaises, cette comédie acerbe met en scène une ancienne écrivaine au succès fulgurant devenue critique sans pitié. Agnès (Alceste) déteste et méprise le monde au plus haut point : ses amis, ses ex, son milieu professionnel, et même son fils. Elle n’a d’yeux que pour le jeune et ténébreux Sascha. Et encore.
Elle ne mâche pas ses mots et offre une vérité crue à celles et ceux qui croisent son chemin. Pour elle, aucun mensonge, aucun paradoxe, aucune mollesse intellectuelle, aucune défaite, aucune bonne raison, même l’amour, n’est valable pour éviter de dire la vérité. Aveuglée par son exigence, elle devient une sorte de kamikaze de la vertu.
«Je ne suis pas frustrée, je suis exigeante, il y a une différence »
Sylvie Drapeau, tenant le rôle principal d’Agnès, entre sur scène, couteau aiguisé à la main, et déclame une tirade des plus âcres sur ce dont elle n’est «pu capable». Un grand moment de théâtre qui place haut la barre des deux prochaines heures d’art vivant que vous allez vivre. Le casting fascine et fonctionne sans fausses notes. Sylvie Drapeau en cet Alceste des temps modernes coupe le souffle par sa performance à la fois incisive et glaciale qui laissera, tout de même, place aux émotions dans une retenue sans fausses notes. Les comédiens et comédiennes formant le reste de la distribution qui l’entourent sont du même calibre et mettent la tension entre les personnages à son paroxysme.
La poésie et l’humour d’Elias (Nathalie Claude), ce Pierrot anachronique, fascine et fait beaucoup rire. Océane (Ariane Trépanier) et Annabelle (Sally Sakho) viennent apporter juste assez de légèreté aux dialogues. Félix Lahaye dans le rôle d’Orlando, le fils d’Agnès, nous charme par sa contemporanéité réaliste, et que dire d’Éric Bernier, Stéphanie Cardi et Luc Chandonnet qui, a eux trois, dans les rôles d’Adrien, Fanny et Sascha, viennent compléter ce panel de personnages aux clichés à la fois cocasses et sincères.
Côté mise en scène et scénographie : il est si agréable de voir que l’on peut faire beaucoup avec peu. Quelques « bean bags » et une immense horloge numérique au mur, le tout dans un univers violet, couleur associée au féminisme depuis plusieurs dizaines d’années, nous transcendent. Ce rapport au temps dans notre société hyperconnectée qui ne dispose pas encore de fair-phone (spectateurs et spectatrices comprendront) ajoute ici, évidemment, une couche de lecture supplémentaire. Le temps, d’autant plus numérique, nous incite à mentir, juste comme il faut, à nous-mêmes, à autrui, et sur cet étrange univers qu’est l'internet.
Plusieurs séquences, cinématographiques à souhait, nous ont fait passer un réjouissant moment de théâtre, allant de celles aux dialogues de couples aiguisés à cette incroyable et fascinante séquence de danse #FEEL.
«L’art est sacré et l’homme vaniteux »
Mademoiselle Agnès est un texte sans aucune pitié. Il était d’autant plus cocasse de découvrir cette pièce un soir de première où metteurs en scène, comédiens et directeurs artistiques remplissaient chaque centimètre carré du Prospero. Avec cette misanthrope à l’honnêteté ultime, Mademoiselle Agnès illustre différents masques sociaux de notre milieu culturel de niche et nous confronte au temps qui passe et au manque de confiance. Une exploration plus que réussie dans notre nature humaine malsaine, qui dégoûte et qui rebute, tout autant qu’elle fascine et qui nous réconforte.
La rentrée culturelle de cette saison 2022-2023 est des plus incroyables et fournies, et Mademoiselle Agnès est l’une des pièces de cet automne à ne pas manquer. C’est définitivement un grand moment de théâtre aux performances captivantes et au texte méta et sarcastique à souhait. Brillant.
Jusqu’au 15 octobre au Théâtre Prospero. Infos et billets.
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