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La pièce Lolita n’existe pas arrive au Théâtre Denise Pelletier du 4 au 22 octobre et promet une belle remise en question du mythe de la Lolita ! Dans une entrevue avec la rédaction d’atuvu, Pamela Dumont, autrice et interprète de la pièce, nous livre sa pensée sur Lolita, l’œuvre de Vladimir Nabokov, objet originel de sa création.
Abordant des sujets tabous intimes et politiques, Lolita n’existe pas incarne des enjeux féministes actuels qui s’adressent aussi bien aux adolescents et adolescentes, qu’au grand public. Road Trip contemporain, la pièce raconte la fuite d’une jeune adolescente et d’un inconnu beaucoup plus vieux qu’elle vers Atlantic City. Si l’histoire n’est pas ouvertement politisée, c’est dans les non-dits et les paradoxes que le spectateur est amené à questionner les rapports de pouvoir et de consentement en jeu.
« Ce qui m’intéresse c’est l’imaginaire populaire qu’il y a autour de la Lolita. »
La genèse de sa création Lolita n’existe pas n’est pas tant le roman en lui-même mais plutôt l’effet du roman : « comment s’est-on emparé de la figure de Lolita ? ». Sa réflexion porte avant tout sur la banalisation de l’éphèbophilie (désir d’une personne adulte envers une adolescente) dans notre société qui contraint les femmes à chérir un modèle de l’adolescente, au corps juvénile et qui refuse de s’émanciper. Il ne s’agit ainsi pas tant de ré-écrire l’œuvre de Nabokov, qui « demeure un chef d’œuvre de la littérature américaine », mais plutôt d’offrir une réflexion sur ses répercussions dans notre société. Comment déconstruire le mythe "de la nymphette adolescente qui désire et provoque le désir des hommes plus âgés" ?
Quand elle tourne pour la première fois les pages du livre de Nabokov, Paméla Dumont est encore jeune. C’est à travers les yeux du protagoniste de 37 ans, qu’elle s’identifie à cette Lolita, et non depuis le regard de la jeune héroïne. Le roman tait l’expérience vécue du personnage qui n’existe qu’à travers la perspective du héros. Lolita, c’est un concept, un mythe. La vraie Lolita, elle, n’existe pas.
« Bien que l’œuvre est indépassable, il reste que la jeune fille n’existe pas. Jamais le lecteur n’a accès à sa perspective, jamais il n’a accès à sa personnalité. Elle est toujours décrite à travers l’oeil de cet homme-là. »
En se replongeant dans l’ouvrage quelques années plus tard, Paméla Dumont décide de faire monter sur scène Lolita, et de lui offrir un autre avenir. Avec le théâtre, elle modifie la perspective du roman : en transposant sur scène l’œuvre littéraire, l’autrice multiplie les points de vue et complexifie le caractère des personnages. Avec cette création, Paméla Dumont cherche à contrer une lecture unique et unidirectionnelle de Lolita.
« Lolita n’existe pas dans la fiction et elle est complètement effacée de la réalité. »
Paméla Dumont s’attaque véritablement à l’oeuvre de Nabokov en 2018 lorsque sort l’enquête de Sara Weiman « The Real Lolita ». Scandale éclatant, l’enquête révèle les coulisses du roman de Nabokov, derrière lequel se cache une histoire vraie qui s’est déroulée dans les années 50 : celle de l’enlèvement d’une petite fille de 11 ans.
Bouleversée par l’effacement non plus fictionnel mais bel et bien réel de « Lolita », elle décide de tirer un trait entre ce fait divers et le roman. À mi-chemin entre réalité et fiction, Lolita n’existe pas cherche à octroyer une voix à son personnage principal. Cette fois-ci, Lolita « ne subit plus la menace, elle est la première à faire des propositions. » Cette fois-ci, la voix du personnage n’est pas effacée, mais forte et assumée.
« On commence avec elle et on finit avec elle. »
Durant toute la pièce, l’héroïne partage la scène avec un homme ordinaire. L’autrice refuse de tomber dans le sensationnalisme et nous rappelle que « les agresseurs sont des hommes ordinaires de notre entourage. » Bien que l’intrigue se déroule dans un contexte pré-metoo, elle s’inscrit dans les luttes féministes contemporaines. L’idée principale de l’autrice est de développer l’esprit critique du spectateur et de la spectatrice quant à la banalisation de ce que signifie être une « Lolita ». La pièce se positionne contre le roman en ce qu’elle redonne une forme d’agentivité à Lolita et prend le public à parti : qu’est-ce que le consentement ? Quel rapports de pouvoir peuvent obstruer ce dernier ?
« Des affiches ont été mises à plusieurs endroits de la ville et rien que le titre démontre notre prise de position. »
Avec sa pièce Lolita n’existe pas, Paméla Dumont ouvre un espace de dialogue et de réflexion sur des sujets qui, comme Lolita, ont trop souvent été tus.
Pour poursuivre la réflexion de Paméla Dumont sur sa pièce, écoutez notre entrevue intégrale dans notre balado! Pour d’autres informations, rendez-vous sur le site internet du théâtre Denise Pelletier.