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Pour la dernière de sa saison, le Théâtre du Nouveau Monde a choisi de présenter la délicieuse comédie romantique de Marivaux, Le jeu de l'amour et du hasard écrite en 1730, et assurément toujours d'actualité. Après que son père, feu Jacques Zouvi, ait joué Arlequin dans cette même pièce il y a quelque vingt ans, et après que lui-même, Alain Zouvi, ait endossé le même rôle, ce dernier a décidé de clore la boucle en s'attaquant cette fois à la mise en scène de ce classique de la comédie de Marivaux.
Fidèle au dispositif du jeu dramatique utilisé à cette époque, à savoir les chassés-croisés et les quiproquos à l'envi, Le jeu de l'amour et du hasard met en scène un père, monsieur Orgon (Henri Chassé) désirant marier sa fille Silvia (Bénédicte Décary). Les mariages « arrangés » constituaient la norme à l'époque, et les filles avaient rarement leur mot à dire quant au choix du prétendant. Ici, Marivaux a voulu démontrer qu'une jeune fille pouvait choisir librement son mari et réaliser un mariage d'amour. En plus des convenances maritales de cette époque, les classes sociales étaient clairement définies, et les mariages inter-classes, fortement réprimés. Cependant, Marivaux, homme des Lumières, était avant-gardiste, féministe avant son temps et préfigurait l'abolition – ou du moins le nivellement – des classes sociales. Ainsi, dans Le jeu de l'amour et du hasard, Orgon est un père libéral, aimant et permissif, qui donne toute la liberté à sa fille d'accepter ou non le prétendant qu'il lui présente.
De connivence avec son fils Mario (Philippe Thibault-Denis), sa fille Silvia et sa servante Lisette (Catherine Trudeau), il met au point un stratagème visant à donner le maximum de liberté à sa fille pour observer – sans être elle-même observée – le prétendant qu'on lui propose, Dorante (David Savard). Le stratagème consiste à faire échanger les vêtements de Silvia avec ceux de sa servante, de sorte que Dorante, le prétendant, croie avoir affaires à Silvia, la promise, alors qu'il s'entretient en fait avec la servante. Cela crée, bien sûr, une kyrielle de quiproquos suscitant le rire, faisant ainsi les délices des spectateurs. L'esprit cabotin de Marivaux ne s'arrête pas là. Voulant mystifier complètement son auditoire, il fait faire le même stratagème au prétendant et à son valet, Arlequin (Marc Beaupré). Les deux échangent leurs costumes et se font passer l'un pour l'autre. La rencontre entre les quatre jeunes gens a lieu. Les quiproquos, chassés-croisés et autres méprises amoureuses se démultiplient, tels des nombres au carré... Et les rires éclatent dans la salle, telles des bulles de plaisir, au sein de ce spectacle d'une grande intelligence.
Le metteur en scène a choisi de camper la pièce dans un jardin provençal, traversé par des rayons de soleil et égayé de chants d'oiseaux. Ce décor très sobre, aux lignes épurées, évoque l'Amour dans ce qu'il a de plus pur et de plus vrai. Il a aussi choisi, pour notre plus grand bonheur – en tous cas, le mien ! – de conserver le niveau de langue soutenu de Marivaux, plutôt que d'utiliser, comme il se fait trop souvent malheureusement au théâtre comme au cinéma, le langage québécois, pauvre et châtié... De plus, les costumes d'époque – bien qu'allégés – ont été conservés. Quel bonheur ! Ces choix de mise en scène contribuent, pour beaucoup, à transporter le spectateur dans un « ailleurs » et une époque différents, ce qui permet le dépaysement auquel aspire, de tout son cœur, le spectateur. On va au théâtre pour rêver et pour être transporté, et non pas pour retrouver sa réalité quotidienne...
Le thème principal de la pièce est, bien sûr, l'Amour; l'Amour avec un grand « A », car, au XVIIIe siècle, la noblesse des sentiments était élevée au rang de l'art. Pour Zouvi, la pièce est une ode au sentiment amoureux, aux puissants émois et à la perte de contrôle qu'il engendre. Pour Silvia, il est essentiel d'être aimée pour elle-même et non pour son rang social. C'est pourquoi elle tentera par tous les moyens de vérifier et de contrevérifier si Dorante (qu'elle croit être Arlequin, le valet) l'aime vraiment. Elle usera de toutes les astuces pour établir la véracité, l'honnêteté et la pureté des sentiments de son prétendant. Par ailleurs, Dorante aussi s'assurera que Silvia l'aime vraiment. De leur côté, les deux domestiques s'éprennent également l'un de l'autre, tout en se méprenant sur leur véritable identité. Ainsi, Marivaux a voulu faire un pied de nez aux préjugés de l'époque et faire la démonstration que l'Amour n'avait que faire des conventions et des classes sociales.
Comme dans toutes les comédies de situation du XVIIIe siècle, après l'intrigue et les quiproquos, vient le temps où les masques finissent par tomber et où chacun retrouve son identité et sa place réelle. Tout rentre dans l'ordre. Les nobles épousent les nobles et les suivants s'épousent entre eux.
Les comédiens, totalement investis dans la pièce, sont excellents, dynamiques, pleins de fougue et d'esprit.
Le jeu de l'amour et du hasard est un texte magnifique, construit comme une robe de dentelle, aux multiples crinolines, retombant élégamment l'une sur l'autre. Les répliques justes et précises s'enchâssent les unes dans les autres pour former un texte fin, ludique, subtil et sensuel. La sincérité des émotions constitue assurément la plus grande beauté de ce texte.
À une époque où le romantisme et l'amour semblent avoir été jetés aux orties, il fait bon de retrouver Marivaux, avec la noblesse des sentiments que ses personnages incarnent. Comme le dit si bien le metteur en scène : « Je voulais créer une bulle d'émotion positive pour notre époque extrêmement difficile ».
Mission accomplie, M. Zouvi ! Ce spectacle était un régal !
Le jeu de l'amour et du hasard est présenté au TNM du 25 avril au 20 mai, plus d’informations ICI.