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Du 27 septembre au 15 octobre, le Théâtre d'Aujourd'hui présente, dans la salle Jean-Claude Germain, la pièce Le Brasier, de l'auteur en résidence, David Paquet.
La mise en scène dépouillée de Philippe Cyr, aux quelques éléments de décor « naïfs » et « simplets », se veut un reflet à l'univers ultra-concret des personnages. Formée de 3 courtes pièces se faisant écho l'une l'autre, Le Brasier constitue un cycle extrêmement bien construit, où le spectateur suit les personnages et en comprend le cheminement. Comment vivre son destin, lorsque celui-ci est marqué par une telle malédiction héréditaire? Peut-on même juste arriver à y survivre? Comment se sent-on dans la peau d'êtres qui n'ont pas demandé à vivre, mais qui se retrouvent avec un tel fardeau sur les épaules? C'est à ces questions fondamentales que cherche à répondre Le Brasier, produit par la compagnie théâtrale L'homme allumette. Les courageux interprètes qui ont osé relever cet énorme défi avec un talent hors du commun sont Paul Ahmarani, Kathleen Fortin et Dominique Quesnel. Vraiment, je leur lève mon chapeau.
Les éléments du décor sont réduits au minimum ou tout simplement inexistants. Et cela n'est pas aléatoire. Tout comme le font les enfants, les personnages simplets, à la personnalité non-développée, de cette première ronde inventent les objets, par leurs seules mimiques ou par leurs sons. Ils inventent leur monde. Ici, nul besoin d'un téléphone : ils font directement le son des touches qu'on écrase « bip bip bip bip » et le tour est joué; tout le monde comprend... Ces trois personnages, trois sœurs triplettes, sont extrêmement démunies et interdépendantes. Elles se téléphonent pour tout et pour rien, incapables de résoudre le moindre conflit intérieur ou la plus petite contrariété. Leur laideur, leur accoutrement impossible et leur sous-humanité nous rebutent et nous interpellent fortement. Devant de tels êtres, si défavorisés en tous points, on n'a envie que de détourner le regard et de fuir. « Mais bon sang, d'où sortent-elles pour être si mal foutues dans la vie? » se demande-t-on. Pourtant, on ne peut s'empêcher de penser à des dizaines de gens qu'on a croisés dans notre vie. Mais c'est justement cette faille, cette brisure qui nous saute au visage – et qui nous griffe – que l'auteur a voulu mettre en relief, afin de secouer notre conscience collective défaillante. On veut nous montrer ces êtres démunis, auxquels la vie a attribué un destin si tragique et si impossible à vivre. On veut nous faire voir ce qu'ils peuvent vivre et ressentir au quotidien. On apprendra plus tard de quel tragique destin elles ont hérité.
Les trois rondes de la pièce mettent en scène les personnages dans trois situations de vie différentes. La première met en scène les triplettes, toutes inadaptées à la vie, mais tentant d'y faire face du mieux qu'elles le peuvent. Elles doivent souvent s'inventer un monde à part, pour ne pas sombrer complètement dans la folie. N'ayant rien reçu, elles ne pourront transmettre à leur tour que malheur et désarroi. Ainsi va le cycle de l'hérédité maudite.
La seconde ronde nous montre comment ces êtres « rejects », devenus adolescents, appréhendent le monde. N'ayant aucune confiance en eux, ils demeurent à l'intérieur d'un monde extrêmement stéréotypé, rassurant, composé de rituels, au ras des pâquerettes. Tout changement à leurs habitudes les plonge dans un désarroi sans nom. Tout en eux est mécanique, robotisé : leur ton de voix, leur débit, leur démarche, leurs propos et même leur sexualité. Ils ne réussiront jamais à s'extirper de ce moule rassurant. Pour le spectateur, c'en est désarçonnant. La débilité des personnages nous marque et nous interpelle. Lorsque j'ai croisé Paul Ahmarani, dans le hall, au sortir de la pièce, je n'ai pu m'empêcher de lui dire combien c'était rassurant de le voir « normal ».
La troisième ronde nous donne la clé de l'origine de cette descendance sacrifiée, marquée par une immense et profonde tragédie. Ici, le personnage, seul en scène, est joué par la magnifique Kathleen Fortin. Incroyablement vraie et intense, il devient impossible, pour le spectateur, d'en détacher le regard. Assise sur un simple tabouret, elle nous livre, avec une émotion intense et une gestuelle tellement signifiante, sa relation à sa sexualité. Centre des pulsions primaires et de l'équilibre psychique, on comprend qu'une sexualité refoulée handicape totalement l'être humain. Ici, on assiste au dévoilement, on ne peut plus sincère et troublant, de la vie intime d'une personne, très mal à l'aise avec sa sexualité. Les psychologues reconnaîtront ici plusieurs de leurs patients... Ainsi, cette femme passera d'une sexualité absente, niée, extrêmement contrôlée, à une sexualité lâchée lousse, aveuglée par l'urgence de la pulsion, et choisissant un être ignoble pour se révéler... L'Erreur à l'origine de tout le Mal... La naissance de la Malédiction...
Avec Le Brasier, l'auteur nous convie à toute une réflexion et nous invite à prendre une leçon de vie. Chaque personne a son histoire et est façonnée par cette dernière. Comment, alors, peut-on se permettre de juger les personnes inadaptées? Elles doivent composer, souvent, avec une histoire impossible...dont on ne voudrait surtout pas hériter, à la loterie de la vie.
Comme le dit si bien l'auteur lui-même : « Le Brasier, c'est mon désir de craquer une allumette au milieu de cet obscurantisme grandissant. Quitte à y mettre le feu. »
Eh bien, c'est réussi, M. Paquet! Merci pour cette pièce incendiairement lucide.
Le Brasier sera présenté jusqu'au 15 octobre au Théâtre D'Aujourd'hui. Des supplémentaires sont déjà prévues les 8,18, 19, 20, 21 et 22 octobre.