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Jeudi soir dernier, un Théâtre de Quat’Sous bondé était l'hôte de la troublante pièce La déesse des mouches à feu. Celle-ci, présentée depuis le 5 mars, est une production du Théâtre PÀP, une compagnie du Théâtre de Quat’Sous qui y inaugurait d'ailleurs sa toute nouvelle résidence. Mettant en vedette onze comédiennes qui avaient la langue... déliée, La déesse des mouches à feu a fait exploser bien des tabous, avec un langage cru dont s'est délecté un public de toutes générations. Aperçu et critique de la pièce, qui tire une grosse flèche acérée dans notre cœur trop tendre...
Un récit cru... et délicieux
La déesse des mouches à feu, c'est tout d'abord un livre écrit par Geneviève Pettersen, paru au Quartanier en 2014. Celui-ci a reçu en 2015 le Grand Prix littéraire Archambault. Le roman a donc été adapté par l’auteure, avec un mise en scène d'Alix Dufresne et de Patrice Dubois, qui a prononcé quelques mots de bienvenue dans le hall d'entrée. Le public entre dans la salle, et les comédiennes arrivent ensuite par les mêmes portes que lui! S'ensuit une brève présentation de la part de chacune des onze interprètes, et le ton est lancé pour la soirée.
Catherine. Une adolescente troublée, à la recherche d'elle-même, habitant au Saguenay, à la fin des années 1990. Un peu comme le film Aujourd'hui est un autre jour, la protagoniste de La déesse des mouches à feu se promène dans onze corps différents. Elle est incarnée dans toutes ses facettes par une superbe brochette d'adolescentes (Lori'anne Bemba, Zeneb Blanchet, Charlie Cliche, Evelyne Laferrière, Alexie Legendre, Éléonore Loiselle, Elizabeth Mageren, Kiamika Mouscardy-Plamondon, Éléonore Nault, Jade Tessier et Amaryllis Tremblay), dont certaines n'ont pas nécessairement de formation dans le domaine. La fluidité des répliques et la justesse de l'interprétation nous convainquent que ce n'est absolument pas un pré-requis! Pour en savoir plus sur le sujet, découvrez l'entrevue ici, à Radio-Canada. D'ailleurs, la richesse culturelle et la diversité des corps et identités est un réel bonus, car l'oeuvre de Geneviève Pettersen est suffisante en elle-même.
(Crédit photo: Bruno Guérin)
Catherine, la luciole: déluge d'émotions
Campée à tour de rôle, Catherine est tantôt en révolte radicale contre l'humanité, tantôt en train de ressentir l'amour le plus authentique, tantôt en délire, sur un trip de drogue... Un reflet du quotidien d'innombrables adolescents, dans lequel un fil conducteur persiste: celui de la découverte de son identité, et de l'affirmation de soi.
C'est dynamique. Les interprètes changent de costumes rapidement, ajoutant ou enlevant certains accessoires pour jouer différents personnages. Ceci inclut ses parents, son chum, ses amis, ainsi que les parents de Marie-Ève, son amie très proche avec qui elle fera ses premières expériences sexuelles. La pièce réussit à sensibiliser les gens de tous âges aux chamboulements de l'adolescence, en utilisant un joual bien québécois, rempli de « tabarnak » bien sentis et de « caliss » bien placés . Même si tout ça est très cru, ce langage très près de notre identité québécoise ne fait jamais grincer le public des dents. Il faut dire que l'auteure s'en est donné à cœur joie, utilisant des néologismes propres à la nouvelle génération, tels que « gouinage » (terme auquel le public rit très fort!), et même quelques régionalismes grivois issus du Saguenay-Lac-Saint-Jean, comme « se douner »!
(Crédit photo: Bruno Guérin)
« Faire d'la mess »: Geneviève Pettersen et l'explosion de plusieurs tabous
Plusieurs tabous ayant trait à la sexualité sont plus que simplement abordés dans La déesse des mouches à feu; ils sont carrément « explosés ». Cela aurait pu en faire faire ciller plus d'un, mais le public est ouvert et attentif à ces voix et à ces sujets, dont on n'entend pas assez souvent parler du point de vue d'une femme: découverte de soi, pornographie, masturbation... Toutefois, un petit malaise est créé, lorsque les comédiennes entre 14 et 18 ans se mettent soudainement à danser très sensuellement et à prendre des poses suggestives... D'ailleurs, tout au long de la pièce, le rythme est un peu « cassé ». Bien souvent, après une scène qui finit tout doucement dans le silence, on est assaillis par une des filles qui crie trop fort quelque chose d'incompréhensible et toute la troupe qui se met à chanter ensuite (du Nirvana, par exemple). C'est parfois difficile à suivre, et même si cela rajoute du dynamisme, la nécessité de passer d'un extrême à l'autre peut pousser au questionnement.
(Crédit photo: Bruno Guérin)
Ceci étant dit, certains moments-clés sont excessivement bien joués, comme la crise de Catherine, après le suicide de son chum, Kevin. Le moment où la protagoniste devient Mia Wallace le temps d'une soirée est aussi très bien réalisé. D'autre part, Éléonore Loiselle attire particulièrement l'attention. Elle semble découper l'air dans lequel elle se déplace avec un couteau bien affûté, ciselant ses gestes avec une finesse et un calcul remarquables. Lorsqu'elle arrête l'action d'une scène pour réciter un texte, c'est tout simplement majestueux. Son look androgyne, ainsi que celui d'Éléonore Nault, qui joue Kevin, est également un plus. Leur présence rappelle que si on additionne 11 interprètes en comptant 1+1 et que cela donne 2, ici, tout au contraire, rien n'est binaire.
Angoisse de fin de soirée
D'ailleurs, pas de baume sur les plaies, ni de fin heureuse. La scène finale, où Catherine vit une crise d'angoisse, est livrée avec un brio à couper le souffle – littéralement. L'atmosphère oppressante et l'effet sonore d'acouphène lancinant contribue à la sensation d'étouffement, pendant que les comédiennes récitent rapidement toutes sortes de désastres et de catastrophes naturelles. On sent poindre en nous une attaque de panique, à la sortie du théâtre... Le souffle court, on réalise que l'effet était réussi haut la main. My god, comme dit souvent Catherine. On reprend nos esprits dans l'air vif et piquant du début de mars.
Déluge du Saguenay, déluge dans nos yeux. Une pièce touchante, qui vient réveiller des vieilles cicatrices et gratter là où ça fait mal. La déesse des mouches à feu est présentée jusqu'au 30 mars. Cessez de tourner autour de la lumière... Les billets sont disponibles ici.