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À travers le triptyque qui a donné naissance à La Goddamn Voie Lactée et Confession Publique, Mélanie Demers et sa compagnie Mayday réfléchissent cette fois sur l’identité noire. Présenté du 13 au 16 avril par l’Agora de la danse, ce spectacle multidisciplinaire éclaté s’inspire du fougueux format de Cabaret neiges noires pour aborder des enjeux brûlants d’actualité auxquels le public québécois est pourtant encore peu exposé.
« Cabaret noir est à la fois une grande célébration autour du concept de la négritude et un espace pour ne pas se laisser encapsuler et essentialiser par la construction limitée de cette noircité, de cette sombritude. »
- Extrait du site web de Mayday
C’est au départ par un besoin de se réunir pour partager sur ses expériences que Mélanie Demers profite d’un laboratoire de création pour s’entourer d’artistes noirs et comparer leurs témoignages. Ainsi Vlad Alexis, Florence Blain Mbaye, Paul Chambers, Stacey Désilier, et Anglesh Major rejoignent sur scène Mélanie Demers dans ce safe space de réflexion d'où jaillissent des points communs, mais également des contradictions.
« On se disait qu’on a souvent été les seules personnes noires d’un groupe, donc on était LA personne qui représente. Là on est un groupe et il y a des choses qui se tissent et des choses qui se contredisent aussi, c’est la force d’être multiple. »
Un esprit maladroit pourrait s’imaginer que le spectacle n’aborde que des thématiques purement issues de l’identité noire, mais pour les noirs qui vivent au Québec, la culture blanche est inévitablement une partie de leur identité. Dans le spectacle, la négritude n’est pas caractérisée seulement par l’identité noire, mais par l’identité d’artiste, qui se nourrit de sa culture pour créer à son tour:
« On a choisi des extraits de textes, films, de séries, de pièces de théâtre, pour bâtir une forme nouvelle mythologie. On appelle ça aussi une cosmogonie; c’est comme de créer un monde à travers cette identité-là qu’on est pas habitués à mettre de l’avant. »
Questionnée à savoir si l’idée était plutôt de s’adresser aux noirs par solidarité, ou encore au blancs pour mieux se comprendre, Mélanie devient incertaine. À mi-chemin entre les deux, elle me raconte qu’à travers la création du spectacle ils pensaient avant tout à ce qu’ils ressentaient le besoin de dire. Puis cette démarche a éveillée de questionnements révélant l’importance de faire un tel spectacle: une enseignante de littérature à qui on avait demandé d’écrire un texte a refusé l’exercice, ayant l’impression inconfortable d'être en train expliquer aux blancs les références:
« Cette prof-là disait “si les gens connaissent pas la référence à "Strange Fruit" de Nina Simone, c’est une ignorance programmée. "Strange fruit" c’est pas un fruit, c’est le corps d’une personne lynchée qu’on regarde pendant un pique-nique. Si quelqu'un ne comprend pas, est-ce que je me mets à l’expliquer dans le spectacle? Ça devient quelque chose de pédagogique et didactique, personne veut ça! »
Ce dilemme amène la réflexion plus loin, mais aucune réponse facile n’apparaît devant la question. Ça reste une expérience rafraîchissante pour Mélanie et ses acolytes d’être entourée de gens qui les encouragent à foncer et à parler de ces sujets en toute transparence.
Dans un Québec qui remet encore en question l’existence d’un racisme systémique, et où les minorités étaient jusqu’à présent plutôt ignorées par les castings, un isolement culturel se crée et les artistes du Cabaret noir sentent leur identité se cristalliser autour de la culture afro-américaine. Se reconnaissant plus dans les médias américains que dans nos médias, les artistes du Cabaret noir partagent des modèles afro-américains, en reconnaissant qu'ils sont des modèles imparfaits:
« Je peux te raconter ce que ça m’a fait la première fois que j’ai vu Lisa Bonet dans The Cosby Show, de voir une fille noire que je trouvais belle, pour la première fois de ma vie! Je me suis dit “ça se peut d’être noire et d’être belle”. »
Le Québec n’est pas négligé pour autant, avec la réinterprétation de personnages comme Doualé de Passe-Partout ou Lucie Baptiste de Lance et compte. En mentionnant le travail d’Émilie Monnet sur l’esclave panise Marguerite Duplessis, elle souligne que pour un peuple comme les Québécois, qui a vécu l’oppression du colonialisme, il est difficile de s’imaginer comme une figure d’oppresseur à son tour, mais que l’esclavage a bel et bien eu lieu au Québec.
« Toutes ces questions-là sont soulevées, mais c’est pas à l’avant-plan. C’est pas un spectacle politique dans ce sens-là, mais c’est politique parce qu’on se met en scène et on essaie d’échapper à une espèce d’essentialisation. Je vais pas raconter toutes ces choses-là dans le spectacle. »