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Des lointaines contrées du Plateau, je me suis rendu en courageux mage à la Cathédrale Notre-Dame, bravant bouchons du samedi soir, bourrasques et flocons. Me perdant et me retrouvant chaque fois grâce à l’étoile de la Place Ville-Marie. Puisant mes forces dans l’espoir d’assister à la naissance d’une œuvre unique, creuset de théâtre, de chants grégoriens et de musique classique. Récit du voyage.
Le faire-part de cette création musicale était impressionnant à bien des égards. Un père brillant, le moine bénédictin Dom Dominique Minier, docteur en théologie et ancien étudiant de l’Abbaye de Solesmes, en France, l’Oxford du chant grégorien. Des parrains de grand talent : Bruno Pelletier – inoubliable interprète du Temps des Cathédrales dans la comédie musicale « Notre Dame de Paris », le ténor Cornelio Montanu, et l’acteur Guy Nadon, qu’on ne présente plus. Une cour remarquable : 120 choristes, 65 musiciens. Enfin, un lieu majestueux en guise de décor, la cathédrale de Montréal. Je dois néanmoins confesser que le miracle attendu ne s’est pas produit.
Des ingrédients de qualité…
La pièce a pourtant bien des atouts. La performance de Guy Nadon est irréprochable. Il excelle en narrateur et confirme ses grands talents de conteur. Sa voix aussi bien que sa présence physique emplissent la nef, et il introduit avec fluidité le volet musical de l’oeuvre.
Celui-ci est servi par une véritable centurie : les deux chanteurs déploient la puissance de leur organe en alternance, ponctuellement appuyés par les choristes et l’orchestre symphonique de l’école Joseph-François-Perrault. Les instrumentistes parcourent des territoires musicaux de tous horizons passant de la musique orientale aux thèmes épiques de péplums. Ces élèves tutoient la perfection, et on est d’ailleurs surpris de leur jeune âge quand, à la fin, ils se lèvent pour le salut final, auquel répond immédiatement le public par un hommage debout.
La mise en lumière de l’intérieur de la Cathédrale offre une toile de fond splendide au spectacle, en habillant de façon dynamique non seulement le chœur, mais également la nef et les galeries supérieures. Elle ne se contente pas de sublimer le décor. Elle plonge subtilement les spectateurs dans une ambiance moyen-orientale par la projection discrète d’arabesques, et la révélation de motifs byzantins dans le décor baroque de l’édifice.
…Pour une bûche qui nous laisse sur la faim.
Le diable se cache dans les détails. On peine à apprécier la substantifique moelle de la narration, pensée comme la colonne vertébrale de l’œuvre. L’enthousiasme – et même l’excitation – qui habite le narrateur, moine bénédictin auteur d’une « découverte majeure pour la chrétienté » est peu compréhensible car les éléments révélés manquent d’ampleur et de précision.
Le codex autour duquel tourne l’intrigue et dont des passages sont cités par Guy Nadon viennent plus souvent frapper les vieilles pierres de la basilique que les esprits des spectateurs. Pourtant adapté par l’acteur pour en rendre intelligible le vieux français dans lequel il est écrit, le texte s’avère à maintes reprises abscons.
Les chants grégoriens, me semblait-il, sont traditionnellement produits sur un mode récitatif, puisant leur rythme dans le texte latin dont certains mots sont accentués et ce dans un jeu de questions/réponses entre le chantre et le chœur. Or, les solistes monopolisent presque le chant, qu’ils déclament dans un style fort éloigné des canons, et qui peine à transporter les auditeurs. Le chœur est étonnamment absent du spectacle, intervenant 3 ou 4 fois seulement et toujours dans des morceaux qui lui sont proprement consacrés, sans dialogue avec les solistes.
Le dispositif scénographique est épuré – c’est un choix légitime, nous sommes plongés dans l’univers puristes des bénédictins du XIe siècle. Cela rend la visibilité des 4 grands écrans latéraux bien ennuyante. S’ils fournissent aux spectateurs du balcon un gros plan salvateur des narrateur et chanteurs, ils sont le plus souvent une épine qui vient fréquemment piquer les yeux des spectateurs. Les animations qui les souillent rappellent tantôt la télévision des années 1980 avec ses longs traveling en filigranes sur des déserts ou des pages de manuscrits médiévaux – des tickets de caisses floutés, à mon avis -, tantôt les blogues d’Heroic Fantasy et leur iconographie en 3D et pourtant si plate. De plus, arriva un moment où je ne pus m’empêcher de déranger mon voisin pour lui signaler, hilare, l’interminable gros plan du ventre d’un chanteur. La régie avait elle abusé de la myrrhe ou de l’encens ce soir là? En plus d’un montage vidéo hasardeux, on aura été surpris par le décrochage bruyant d’une lampe, et un micro ouvert avec retard – Doux Jérusalem – pendant la scène finale.
En ces temps de fêtes de fin d’année, la pièce laisse donc le goût d’une bûche de Noël appétissante sur le menu et certes préparée avec d’excellents ingrédients, mais dans une précipitation qui entraîne un dosage hasardeux et une présentation mal ficelée.
On ne passe pas un mauvais moment et de nombreux spectateurs s’en satisferont sans doute, mais au vu des moyens mis en œuvre, du casting, du prix des places, et de l’ambition des producteurs d’instaurer avec « Les mages » un nouveau rendez-vous annuel magique pour les fêtes à Montréal, on s’attendait à un délicieux dessert.
Dom-mage.
Représentations les mardi 20 décembre, mercredi 21 décembre, jeudi 22 décembre 2016, à 19 h 30. Durée environ 1 h 15. Pour plus d’informations : www.lesmages.ca.