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C'est avec la grandiose et magnifique huitième symphonie de Gustav Mahler, appelée aussi « Symphonie des mille », que l'Orchestre Symphonique de Montréal (OSM) ouvrait hier sa 83e saison. Pour marquer l'événement, l'OSM avait choisi l'une des œuvres les plus marquantes et les plus impressionnantes du répertoire classique. En plus de l'Orchestre au grand complet, on retrouvait sur scène trois chœurs, dont l'un formé d'enfants (Les petits chanteurs du Mont-Royal) et huit solistes. Ces quelque mille musiciens (d'où le nom « Symphonie des mille ») étaient dirigés par le très grand maestro Kent Nagano.
Sans même avoir livré leur première note, la seule vue de tous ces musiciens et chanteurs emplissant la scène et le chœur au grand complet de la Maison symphonique représentait un spectacle des plus impressionnants. Les yeux étaient déjà ravis, avant même que les oreilles le soient à leur tour. C'est donc avec une maîtrise parfaite de son travail que chacun des quelque mille acteurs de cette immense fresque musicale s'est employé à nous donner un concert inoubliable. Le chef de chœur de l'OSM, Andrew Megill, conjuguait son talent à celui du chef de chœur des Petits chanteurs du Mont-Royal, Andrew Gray, et les huit solistes invités y ajoutaient leur prestation, le tout sous la baguette précise – et presque magique – du grand maestro Nagano. Ouf! Quelle soirée! Quel déploiement incroyable!
Le contenu de la Symphonie n° 8 en mi bémol majeur, « Des mille », est également des plus intéressants. Composée en 1906, cette avant-dernière symphonie du compositeur viennois renoue avec l'intégration des textes chantés et allie deux parties dont les thèmes, à première vue, semblent aux antipodes. La première, « Veni Creator Spiritus », est un hymne latin dédié à l'Esprit créateur remontant au IXe siècle, tandis que la seconde, constituée de la scène finale du Faust de Goethe, a été écrite en allemand quelque mille ans plus tard, et traite du salut de l'Homme par l'Éternel féminin. En juxtaposant ces deux textes, Mahler a voulu célébrer l'union des principes masculin et féminin du Divin.
Pour saisir toute la portée de cette juxtaposition, il importe de connaître les origines du mythe de Faust, repris par Goethe quelque 200 ans plus tard. Dans la légende populaire, qui émerge au milieu du XVIe siècle, Faust est présenté comme un érudit aux dons exceptionnels. Déçu du peu de connaissances acquises au terme d'une vie consacrée à l'étude, il vend son âme au diable (Méphistophélès) afin d'obtenir en échange « l'accès aux fondements derniers des choses » (la Vérité des Vérités). Or, Satan, bien entendu, ne lui procure pas ce qu'il cherche. Au lieu de cela, il l'entraîne dans une direction tout à fait opposée: il lui fait vivre 24 années de vie futile, consacrée à la luxure et composée de nombreux revers, jusqu'à sa mort horrible. Ce dernier est ensuite livré aux tourments sans fin de l'enfer, sort réservé à « tous les impies que poussent la démesure et la curiosité blâmables. » (Au XVIe siècle, la curiosité était condamnable.) Heureusement qu'au siècle des Lumières, lorsque Goethe reprend le sujet, la curiosité est vue comme une qualité, comme une façon de se surpasser. Ainsi, le jeune écrivain fera de Faust un homme qui, après chaque chute, se relève, et poursuit avec obstination sa quête pour un monde meilleur. Il rompt également, dans ce deuxième Faust, avec la damnation éternelle du premier. Goethe fait en sorte que le Ciel intercède en faveur de Faust sous la forme d'une grandiose Deus ex machina, où paraît la Mater Gloriosa. Pour montrer qu'il rompt définitivement avec la damnation éternelle, il écrit, dans un passage de la scène finale – qui sera chanté par le chœur des Anges:
« Celui qui lutte sans jamais se lasser,
Nous pouvons le racheter,
Et quand de là-haut
L'amour a pris parti pour lui,
La légion des bienheureux vient l'accueillir,
Avec une cordiale bienvenue. »
L'activité de Faust grandit et se purifie à la fin, et c'est l'éternel amour qui, de là-haut, vient à son secours.
La version musicale la plus grandiose et la plus achevée de cette Transfiguration de Faust est sans conteste celle que Mahler propose dans sa Symphonie des Mille.
C'est donc cette quête mystique qu'est l'Amour, cette perfection et cet apaisement que l'Humain cherche toute sa vie, qu'a voulu exprimer Mahler dans cette symphonie. C'est cette métaphore, illustrée par « L'Éternel féminin » qui, à l'inverse du désir, de l'éternelle lutte, bref de « l'Éternel masculin », est illustrée à travers la Huitième symphonie de Mahler. On pourrait dire que le masculin est transposé dans la première partie, alors que le féminin l'est dans la deuxième partie. Ainsi, les deux s'opposent par moments, se complètent, s'affrontent, pour finalement se transformer en une unification de l'Être.
Cette métaphore du yin et du yang peut aussi s'appliquer aux tribulations de la température, de la lutte des classes, du changement de civilisations, bref à toute l'actualité du XXIe siècle... C'est pourquoi cette œuvre est si forte, si majestueuse, impétueuse comme les mers qui sortent de leurs lits, comme les réfugiés qui migrent sous la force de la survie...
La Huitième symphonie « des mille » est un hymne à la vie, à l'espoir, aux déchaînements des deux grands axes de la vie, le Bien et le Mal...
Les solistes invités ont livré une remarquable performance. On retrouvait les sopranos Sarah Wegener, Camilla Tilling et Aline Kutan, la mezzo-soprano Allyson Mchardy, la contralto Marie-Nicole Lemieux, le ténor Michael Schade, le baryton Russel Braun et la basse David Steffens.
Bref, ce fut un concert extraordinaire, coiffé d'une très longue ovation debout, où l'un des solistes lança même son bouquet de fleurs dans la foule, au grand plaisir de cette dernière.
Pour découvrir la programmation 2017-2018 de l'OSM, cliquez ici.