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D’abord publié en 2015, le premier roman de Fanny Britt, Les maisons, est réapparu sur les tablettes des librairies cet automne suite à sa réédition en format de poche. L’auteure, qu’on connaissait déjà comme dramaturge, traductrice, essayiste (Les tranchées) et auteure jeunesse, y livre une écriture tout aussi perspicace que lucide et y aborde les angoisses d’un quotidien ordinaire.
C’est que l’histoire qu’on découvre au fil des pages du livre Les maisons sert de prétexte pour discuter de « la désillusion entre la projection qu’on se fait de l’avenir à 15, 20 ans et la réalité de la vie », comme l’expliquait Fanny Britt en entrevue avec La Presse. En résulte un fil conducteur qui aborde inévitablement ce difficile équilibre que demande à la fois une société qui dicte la réalisation de soi, de ses rêves et de ses ambitions, puis les nécessités de la vie qui mènent souvent vers le conformisme et, parfois, l’insatisfaction.
On y suit ainsi Tessa, 37 ans, chanteuse convertie en agente d’immeuble, mère de trois enfants et amoureuse comblée. Celle-ci rencontre, dès le premier chapitre du récit, son premier amour de jeunesse entre les murs de cette maison qu’elle doit mettre en vente, la sienne en l’occurrence. Font suite à ces retrouvailles troublantes trois journées durant lesquelles la femme idéalise et craint à la fois ce rendez-vous fixé avec cet amant ressurgit du passé, un homme l’ayant aussi bien révélé à elle-même que laissé dans l’amertume des rendez-vous ratés.
Entre les visites immobilières, les nuits en amoureux et les repas à préparer, l’auteure nous livre ainsi un accès privilégié au flot incessant de pensées de sa protagoniste, livrée à elle-même devant ce dilemme qui crie l’impossibilité. Doit-elle vraiment poursuivre ce passé l’ayant laissé sans réponses, risquant de briser une vie familiale et amoureuse qu’elle dépeint pourtant avec un amour évident? Mais sinon, comment s’affranchir de cette peur, celle de finir, par exemple, comme cette mère usée n’ayant pas su accéder à ses désirs, dont Tessa se navre dans ce passage du livre où elle décrit ses réflexions préadolescentes : « Une autre femme de la ville était remplie du même mystère, belle malgré les doigts étranglés par les poignées des sacs d’épicerie trop chargés, accablée de la fatigue de celles qui n’ont pas le temps d’espérer mieux. Montréal, à notre arrivée en 1982, était peuplée de ma-mères. » Comment être en paix avec soi-même sans tenter l’inconnu?
Il est fascinant d’assister à ce combat que Tessa se livre à elle-même dans Les maisons, hésitant à repousser une vie qui lui paraît trop évidente, formatée, pendant qu’elle s’imagine pourtant avec conviction faire tout chavirer: « Je saurai peut-être les donner, après. Lorsque la tempête passera, les conversations difficiles et le branle-bas de combat; une fois Jim et moi vaincus et vidés, il sera facile de donner les bacs de vêtements. » Alors que Tessa revisite, lors de cette période agitée, des souvenirs marquants de son enfance et de sa jeunesse, on comprend mieux à travers la plume habile de Britt, la haine que l’on porte parfois à soi-même, par le biais de nos choix qu’on remet en doute ou regrette, l’esprit ayant comme point de mire les mille autres opportunités que l’on aurait pu saisir, semblant toutes plus adéquates et reluisantes.
On retrouve ainsi cette obsession moderne du désir de se réinventer jusqu’aux toutes dernières lignes du roman, là où l’on découvrira finalement ce que Tessa choisit : « On quitte continuellement quelque chose, ou quelqu’un. Combien de clients ai-je vus se torturer au moment de vendre la maison dans laquelle leurs enfants étaient nés, pour se jeter avec avidité sur la première offre alléchante? […] Pourquoi ne saurais-je pas, moi aussi, m’éloigner avec aisance de tout ce qui m’est familier, de ce qui m’appartient et porte mes traces? »
Et parce qu’il n’y a pas meilleure façon d'aborder le drame que par l’humour, le livre Les maisons est écrit dans un langage où l’autodérision, les dialogues bien ciselés et les pensées douces-amères sont maîtres, le tout étant toutefois porté par cette sagesse qu’apporte l’expérience. Cette première publication de Fanny Britt s'avère incontournable et s'affiche comme une évidence dans l'univers littéraire québécois.