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Hier soir, j’assistais à la première de La Complainte du givre, une création de Simon Renaud qui met en scène l’autrice-compositrice Joanie Michaud et la danseuse-chorégraphe Marie-Pier Gilbert. Les planches de La Chapelle Scènes Contemporaines accueillent ce deux-en-scène de l'intime jusqu'au 14 décembre.
Résidence au Danemark, 2020 : une chanteuse et une danseuse vont chacune se mettre à nu pour enfiler les vibrations de l’autre. Accompagnées par Simon Renaud, les deux artistes travailent alors sur les tenants de la création en sortant de leurs zones de connaissances et de conforts. Aujourd’hui, La complainte du givre, fait résonner les tensions, instabilités et forces de ce passé artistique réactualisé.
Alors que nous entrons dans la salle, les artistes sont déjà sur scène, enfouies sous de gros duvets molletonnés. Pendant toute la préparation des spectateurs, allant des discussions pré-show, à l’installation sur les sièges orangés, au silence prolongé, nous cohabitons déjà tous et toutes ensemble. Seuls deux gros tissus nous barrent l’accès direct aux artistes et nous obligent à imaginer l’humanité qui se cache en dessous. Les premières minutes se font sentir, les mouvements y sont extrêmement minimalistes. Bien qu’un peu longue à mon goût, cette partie permet de calmer notre respiration et d'apposer réellement nos regards pour débuter une réflexion autour de ces duvets sur pattes.
Ce flottement dans le temps nous transporte dans un espace moelleux bien connu. Pour certains ce sera un duvet, une couette, pour d’autres il prendra la forme de couverture ou de plaid, mais tous représentent le réceptacle de nos émotions les plus terrifiantes. Lieu de discontinuité avec ce qui l’entoure : le duvet est bien plus qu’un simple tissu. Il couve nos rêves et nos cauchemars - il se nourrit de nos craintes, tristesses, colères et frustrations mais il encercle aussi nos romances, heureuses, passionnelles et se gorge de nos joies. Sur les traces des duvets sur patte, j’ai été transporté aux confins de mon enfance, là où les couvertures rimaient avec cabanes enchantées et châteaux merveilleux, là où les tissus étaient brandis comme des boucliers entre l’enfant qui grandit et le monde extérieur encore inconnu et effrayant.
Face à l’inconfort de la première scène, j'ai fini par me laissée transporter dans l’intimité des artistes qui refletait en réalité ma propre vulnérabilité.
La lenteur du début, le fait que les deux artistes se cachent, qu’elles se cherchent, qu’elles prennent le temps de se découvrir, nous éloigne de nos habitudes contemporaines d’optimisation du temps et de surexploitation des corps. Les tout petits gestes et les tremblements viennent se frotter au décor gelé (des panneaux vernis argentés) et la complainte du givre commence.
Rencontre entre gouttelettes d’eau et surface froide, passage d’un état liquide à un état solide, le givre symbolise cette rencontre entre Marie-Pier Gilbert et Joanie Michaud. Il cristallise la fragilité de se livrer entièrement à l’art, à l’autre, et à l’art de l’autre. Extrait d’une fusion extrêmement forte, le givre est par essence éphémère, sa fin de vie est toujours la même : il se craquèle et fond. Les deux interprètes jouent avec brio sur ces différents niveaux de tension : elles tentent, trébuchent, réessaient, se trompent, se soutiennent : le processus de création en devient l’objet même de création.
La complainte du givre de Simon Renaud se joue encore ce soir et demain soir (13 et 14 décembre) à La Chapelle - Scènes Contemporaines.