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La famille circassienne de Saint Alphonse-Rodriguez, ayant d’abord souhaité envahir les églises des régions du Québec, a décidé d’amener l’église au cirque. Son spectacle Tabarnak, présenté à La Tohu du 2 au 12 octobre, prend les allures d’une grand-messe, d’un match de hockey, d’une veillée de musique traditionnelle et d’un concert rock. Une belle énergie règne dans la salle et la scène est assaillie d’objets aux allures «d’antan». Tabarnak rappelle des traditions perdues dans notre société du XXIe siècle, caractérisée par la perte de sens, l’individualisme et les récurrents débats sur la laïcité.
Au sein d’une église catholique, le tabernacle est le meuble abritant le ciboire, qui contient les hosties consacrées au cours de la messe. Le tabernacle, dans notre société québécoise en rebellion et plutôt laïque, c’est devenu un adverbe, un nom, une ponctuation : «Tabarnak, j’en reviens pas», « il pleut en tabarnak», «le vieux tabarnak»…
Le metteur en scène Alain Francoeur, raconte la genèse du projet :
«Tabarnak est né du désir de présenter le cirque dans les églises pour se promener en régions. C’est l’idée qui a amené la question d’amener plutôt l’église au cirque. La religion… c’est un sujet épineux. Pour ce projet, nous avons fait le choix de travailler sur l’espace matériel de l’église, ce que ça représente (du sous-sol, à la messe, vers les cieux). L’identité religieuse du Québec est importante, de par notre passé et l’éducation, et ce même si aujourd’hui la majorité des Québécois ne sont pas nécessairement croyants.»
Tabarnak est une histoire d’identité, de métissage et d’acceptation, dans une société où se mêlent toutes les langues et les religions. La pièce intègre entre autres un numéro de danse turque, les derviches tourneurs de la tradition soufie, où les hommes vêtus de longues robes tournent dans un état de transe. Pour Tabarnak, les robes, patiemment tricotées par l’un des artistes, ont des allures de bas de laine bien canadien!
Tabarnak condamne aussi, sur un ton humoristique, les excès fanatiques de l’église catholique au Québec, ce qui lui a valu un profond rejet durant la révolution tranquille. Parmi les numéros qui ont su tirer noss éclats de rire : la lecture des prédictions astrologiques et le rituel, en cinq étapes inspirées du baptême catholique, dirigé par la voix languissante, quasiment ennuyée, d’un « Grand prêtre » aux demandes insensées, fidèle représentant du fanatisme religieux. De façon subtile, plusieurs critiques de pratiques religieuses autour de la souffrance, la culpabilité et le repentir, se glissent dans le spectacle : le numéro de fouet sur la slackline, les poses exprimant la soumission…
Portrait de famille québécoise
Tabarnak, enfin, est un portait du Québec d’antan et d’aujourd’hui. C’est la vocation du Cirque Alfonse : perpétuer une tradition de cirque familial itinérant et faire revivre les veillées de musique traditionnelle en cuillers, gigue et claquette. Ainsi, les spectacles Timber! revisite l’univers des camps de bûcherons et BARBU s’inspire des foires d’antan. De même, Tabarnak s’ouvre avec un remake de l’hymne national dans une arène de hockey, auquel le public participe activement. Suivent un numéro de danse percussive avec claquettes, et d’impressionnantes manœuvres en patins à roulette. À la musique traditionnelle Québécoise sont intégrés des sons religieux, dont une chanson en latin. Mais le Cirque Alfonse ne limite pas ses choix artistiques, empruntant au rock, et autres traditions musicales : «on veut des gros tambours, ben on ajoute de gros tambours!». Tabarnak, créé en trois mois dans la grange familiale à Saint-Alphonse-Rodriguez, est en tout cas empreint de l’esprit des grandes familles d’antan!
«Ça fait tellement longtemps qu’on travaille ensemble, on se connaît bien, la création se fait rapidement. Oui, on a parfois de la difficulté de séparer travail et famille; on finit souvent les soupers en parlant de cirque. Mais on est chanceux de pouvoir voyager en famille, comparativement aux artistes qui doivent s’en séparer pour les tournées!»
Parmi les plus prouesses circassiennes de la pièce, nommons le numéro de main à main et celui, final et plus risqué, de la balançoire russe, impliquant un pousseur, un voltigeur et deux personnes au tapis. Soulignons aussi l’épatante technique acrobatique de Nikolas Pulka, que soit à la corde lisse, aux sangles ou encore au numéro de mâts chinois. Le numéro de plateau tournant est puissamment porté par le chant de Julie Carabinier Lépine, un cri de rébellion pour la liberté de de tous et chacun.
Tabarnak, moins bien reçu chez nous
Lors de la période de questions avec les artistes, une spectatrice a demandé si, malgré son titre provocateur, la production avait été bien accueillie partout dans le monde. «C’est au Québec que ça été le moins bien reçu, à l’étranger le monde ne comprend pas ce que ça veut dire!». Tabarnak est une bonne occasion de réfléchir à la question de la laïcité au Québec, dont l’histoire remonte à bien longtemps. Au 18e siècle, l’idée de créer des écoles non confessionnelles dans le Haut et le Bas-Canada était combattue farouchement par le clergé. Plus tard, au milieu du 19e siècle, les patriotes prônaient la laïcité totale du gouvernement et l’égalité devant la loi de tous les citoyens, y compris les Autochtones, sans égard à la langue, la religion ou l’origine ethnique. L’idée d’un état laïque a repris forme durant la Révolution tranquille, qui a vu naître des écoles, des hôpitaux publics laïcs et un appareil d’État moderne et persiste aujourd’hui, avec le projet de loi 21… Un débat toujours vivant!
Merci au Cirque Alfonse d’avoir amené l’Église au cirque, pour une réflexion identitaire qui sera probablement toujours d’actualité!