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Du 4 au 15 octobre dernier s’amorçait la saison propre au rayonnement du septième art, avec l’une des rencontres les plus stimulantes et réjouissantes qu’offre la métropole aux cinéphiles et acteurs du milieu : la 52e édition du Festival du Nouveau Cinéma.
La fin des temps doux, si elle nous fera sans doute bien vite regretter la légèreté et l’effervescence des grands rassemblements extérieurs, a aussi du bon. Avec l’arrivée du vent glacial et de la pluie, voici venu un climat fort propice à l’accentuation du plaisir délicat de se retrouver au chaud dans l’intimité et la magie qu’offrent les salles obscures. Le Cinéma Impérial, du Musée, du Parc et Moderne, le Cinéplex Quartier Latin ainsi que la Cinémathèque québécoise étaient de la partie pour accueillir les contemplatifs alanguis en quête d’un tendre refuge, les amateurs de sensations déroutantes, les artisans d’idées et de rêves nouveaux.
Les films qui forment la programmation du FNC sont divisés en sept sections, selon des critères formels, thématiques et selon leur notoriété, ce qui permet de naviguer avec bonheur au sein d’une offre hautement diversifiée, mais qui ne manque pas de cohérence. Les sorties attendues et les chouchous du public sont rassemblés parmi Les Incontournables. On y retrouve entre autres les nouveaux Wim Wenders, Sofia Coppola et Atom Egoyan. Les audaces thématiques et formelles les plus folles se rangent sous la catégorie Les nouveaux alchimistes. Les voix plus politiques et historiques sont entendues respectivement parmi le Panorama international et l’Histoire du cinéma. La révolte et l’exubérance, quant à elles, sont canalisées chez les élus du Temps Ø. Et pour finir, les champions du court et du long métrage, toutes catégories confondues, s’affrontent dans la compétition nationale et la compétition internationale.
Le Festival offre aussi plusieurs occasions de réduire l'écart entre public et acteurs du milieu, ce qui est très appréciable à propos d'une forme d'art où se rencontrent la plus grande proximité et la plus grande distance : une fois achevé, le film plonge avec on ne peut plus d’immédiateté de l'esprit du créateur, mais il nécessite pour être produit la médiation de dizaines de personnes ainsi que d'un très lourd appareillage technique et économique. Discussions croisées entre cinéastes, performance au piano, intervention de chercheurs en neurosciences, riche programmation musicale et événementielle… : de nombreux dispositifs étaient mis en place pour rendre le cinéma festif et le placer au cœur de la vie de la cité.
J’ai eu l’occasion de cueillir au vol quelques splendides audaces cinématographiques portées par cette vivifiante bourrasque d’automne. En voici un échantillon.
J’ai fait la rencontre avec ce cinéaste pourtant dans la mire des spécialistes et amateurs depuis plus d’une décennie, avec Good luck banging or Loony Porn, présenté au FNC l’an dernier, qui ouvre une fenêtre, en provoquant des rires nerveux et grinçants sur le fanatisme, l’incohérence et l’étroitesse qui se donnent à voir dans leur choquante nudité au cours du procès de sorcellerie livré à une honnête, mais désinhibée enseignante. Radu Jude a commencé sa carrière en grande pompe en tant qu’assistant-réalisateur pour le film Amen de Costa-Gravas en 2002. Depuis, il a signé une série télé et quelques courts-métrages, avant de se lancer dans le long et de s’imposer comme une des figures à surveiller du paysage cinématographique mondial.
Do not expect too much from the end of the world est sans aucune hésitation mon coup de coeur du Festival, si ce n’est de l’année 2023 jusqu’à présent. On y suit dans son quotidien haletant une assistante de production, qui manie la répartie avec autant de dextérité que sa voiture dans la jungle urbaine, alors qu’on lui confie la mission de recruter de pauvres bougres en pleine faillite personnelle et prêts à se prostituer moralement pour les fins d’une campagne de ethical washing, dans le triste espoir de trouver les moyens financiers de chauffer leur taudis tout l’hiver. C’est malheureusement sans exagération que la réalité, le plus souvent simplement fardée d’humanité et de sens, se dévoile dans une cruauté et une absurdité qui suscitent le salutaire mécanisme physiologique du rire, soupape de décharge permettant d’éviter l’implosion d’un système en surchauffe. On sort de ce très long film (163 minutes) absolument punk et sexy, épuisés d’hilarité et de colère, mais heureux et satisfaits, avec le sentiment de justice (très partiellement) rendue qui survient lorsqu’enfin a été exprimé en toute vérité ce qui devait l’être.
Lorsque je me suis posée dans la salle avant le début du film, j’étais dans un état culminant d’excitation et d’agitation, tel qu’occasionné quelques fois par les multiples stimulations sensorielles qui épicent continuellement notre quotidien : profusion d’activités, de possibilités, de choix, de plaisirs, de préoccupations, d’idées, de goûts, de sons, de lumières, de gens. Il sera impossible, me disais-je, de me placer dans la disposition contemplative que requiert le film que j’ai choisi de voir aujourd’hui.
Pourtant, la médecine de saṃsāra a bel et bien fonctionné. Il ne se passe à peu près rien, du point de vue de nos habituelles attentes narratives, dans ce film de près de deux heures. Pourtant, du point de vue de l’absolu, pourrait-on dire, tout y est montré, puisqu’on y traverse le saṃsāra, cycle de renaissance et de souffrance dans lequel sont confinés tous les êtres doués de conscience : la délicate trame sur laquelle s’adossent nos existences, peu importe la figure qu’on choisit de lui donner. À travers un périple entre le Laos et les plages du Zanzibar, ponctué de paysages émouvants de splendeur, de lumière et de vie, on est conduit doucement vers une ouverture à un rapport au temps et à l’être fait d’observation plutôt que d’attente, fait de lenteur, d’empathie et d’amour.
Dans un montage tapageur de 70 minutes, qui fait penser, par sa précision, son rythme syncopé, sa fulgurance, sa cohérence dans la déconstruction, au free jazz le plus inspiré, l’artiste multidisciplinaire KHAVN (dans le doute, on est tenté de le prononcer « Kaven » ou « Kevin »), figure centrale du cinéma philippin, nous offre, avec National Anarchist: Lino Brocka une plongée passionnante directement dans la matière de l’immense œuvre de Lino Brocka, activiste et cinéaste qui a eu à cœur tout au long de sa carrière de produire un cinéma populaire au service de l’élévation esthétique et politique de son peuple. Le résultat est un hommage sous forme de collage très réussi autant sur le plan thématique qu’esthétique. On traverse du même coup comme un coup de vent l’histoire récente des Philippines, dans un survol rapide qui couvre le plus large possible, mais sans éparpillement, ouvrant curiosité, questions et émerveillement.
Tous les films projetés à cette dernière édition du FNC, incluant ceux-ci, sont toujours répertoriés sur leur site Internet. À consulter afin de surveiller dans les mois qui viennent une éventuelle et espérée diffusion en salle au Québec, hors du circuit parfois hermétique des festivals.